Est-ce qu'on demanderait à un enfant myope de passer son brevet sans ses lunettes ? Nope.
Pourtant, c'est peu ou prou ce qui arrive à mon neveu.
Comment est-ce possible ?
@s_cluzel @jmblanquer, voici un peu de lecture ⤵️
Je vous présente A., mon neveu. Il a 15 ans, est en 3ème. Il est très dyslexique, dysorthographique, et dysgraphique. Bref, il écrit (très) mal et il fait encore des fautes d’orthographe à son nom de famille. Son cerveau ne «photographie » tout simplement pas les mots.
A. a aussi des troubles du spectre autistique (TSA). Il est donc autiste. Autiste léger certes, mais autiste quand même (j'ai toujours trouvé que ça le rendait charmant, mais je ne suis pas objective).
Pas de bol pour lui (vous le comprendrez vite), A. a aussi un QI de dingo (un vrai, pas celui qu'on teste sur internet). Et c'est un énorme énorme énorme bosseur qui ne rechigne JAMAIS à la tâche. Mais je le bats quand même à Mario Kart, faut pas déconner.
Depuis le CM1, il a des aménagements pédagogiques validés par l’Education nationale dans un PAP (plan d’accompagnement personnalisé). Un médecin de l’Education nationale le valide chaque année depuis 5 ans.
Il bénéficie donc depuis 5 ans au sein de son école, des aménagements qu’il demande pour le brevet. Il a, entre autres, un 1/3 temps pour ses interros, des dictées aménagées, et la non prise en compte de son orthographe. Par ailleurs, il a le droit de se servir de son ordinateur.
Depuis mars 2021, il bénéficie d’une reconnaissance de handicap par la Maison départementale du handicap (MDPH).
Quand vous passez un examen, vous pouvez demander à bénéficier d’aménagements (tiers temps par exemple ; ou quelqu’un qui reformule les questions, etc…).
Cette demande doit être faite auprès du SIEC (la Maison des examens). Tu remplis un beau dossier, avec tous les compte-rendus qui vont bien et qui sont actualisés – au cas où ton enfant ne serait plus dyslexique, sait-on jamais !
Ca coûte très cher financièrement et cela demande beaucoup de temps de faire ce dossier car certains bilans ne sont pas remboursés et coûtent jusqu’à 300 euros. Il faut aussi une lettre du pédopsychiatre (150 euros la consult à Paris !). Bref, tu ne fais pas une demande si ...
tu n'es pas motivé et/ou si tu n'as pas les moyens (ce qui est déjà assez dégueulasse).
En janvier 2021, ses parents reçoivent l’avis du médecin de la MDPH destiné au SIEC, qui refuse les aménagements (sauf l’ordinateur…). La même MDPH qui reconnaîtra le handicap en mars, validera et rendra obligatoires les mêmes aménagements demandés dans le cadre scolaire !
Cet avis ne peut pas faire l’objet d’un recours. On doit attendre la décision du SIEC… Tic tac tic tac ...
bien, figurez-vous que ce matin. Jour de brevet blanc au collège, A. se pointe à l’horaire indiqué pour les « tiers temps ». Le directeur, très ennuyé, lui indique qu’il a reçu la décision du SIEC jeudi (datée du 1er avril…) et qu’il n’a pas obtenu cet aménagement d’examen.
Il a seulement eu l’autorisation d’utiliser son ordinateur. Le directeur appelle donc sa maman. Les parents n’ont jamais reçu la décision du SIEC, et ne peuvent donc exercer de recours. Le brevet a lieu le 28 juin. Et bien évidemment, le SIEC est injoignable.
Cette décision est incompréhensible au regard des annonces gouvernementales. Un décret du 6 décembre 2020 est soi-disant venu systématiser la validation des aménagements aux examens, quand ceux-ci étaient déjà mis en place et validés par l’Education nationale durant la scolarité.
L’ancienne députée d’Eure-et-Loir, @lauredlr, avait d’ailleurs soulevé ce problème en octobre dernier lors de l’examen du projet de loi ASAP, et on lui avait dit que ce texte viendrait régler le problème dès les examens de juin 2021.
Pourquoi cette décision ? Peut-être parce qu’A. a de trop bonnes notes pour avoir des aménagements. Un enfant handicapé doit être, pour l’Education nationale, un enfant en échec scolaire.
A. a de bonnes notes car il travaille deux fois plus que les autres. Le fonctionnement de son cerveau entraîne des lenteurs et des difficultés de compréhension qui lui font perdre beaucoup de temps. Sans le tiers temps, on ne compense pas son handicap.
Il aura peut-être 13 au lieu de 18 et l’Education nationale trouve ça normal. Pour la dictée, on lui demande de faire un exercice qu’il est incapable de faire.
Drôle de conception de l’école inclusive : en fait, des enfants en situation de handicap ont juste le droit d’être en échec…s’ils ne le sont pas, on s’assure de leur mettre la tête sous l’eau.
Dans cette affaire, l’Education nationale a refusé des aménagements pour un examen, aménagements qui sont accordés à l’enfant depuis 5 ans dans le cadre de sa scolarité. Ces aménagements sont chaque année validés par le médecin de l’Education nationale.
Et le médecin de la MDPH donne un avis défavorable à des aménagements que la MDPH a validé et rendu opposable aux établissements scolaires.
Le décret du 6 décembre 2020 n'a eu aucun effet : quels sont les pouvoirs des ministres sur leurs administrations ?
Et pour A., qui passe son brevet dans 1 mois, quelles solutions ?
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