Une prise de parole puissante, parce qu’apaisée, déterminée. L’assassinat de Chahinez, la barbarie de celui qui l’a considérée comme sa chose m’ont horrifié. Il n’y aura jamais de mots assez forts pour traduire la tristesse, le dégoût.. et la colère ressenties. Cela raisonne https://twitter.com/bfmtv/status/1389995772524089344">https://twitter.com/bfmtv/sta...
d’autant plus fort que je suis agent de probation. Que je travaille avec des auteurs placés sous main de justice. Que derrière cette machine froide qu’est la Justice sur laquelle se jettent des gens, la bave aux lèvres, sans rien connaître d’autre du dossier que les informations
éparses, contradictoires, mensongères, lapidaires, incomplètes, déconnectées qu’ils consomment dans les médias, il y a des femmes et des hommes qui œuvrent en toute bonne foi, avec les moyens qu’ils ont, en ayant parfaitement conscience des enjeux, confrontés à des publics durs
et qui vivent chaque jour de leur vie professionnelle, et personnelle, parce que nous ne sommes pas des robots, nous n’appuyons pas sur un bouton « reset » en franchissant les portes du boulot le soir, avec l’idée que la personne qu’ils ont en face d’eux peut commettre le pire
en sortant de leur bureau. Alors oui, je le dis, si des efforts ont été fait au fil du temps, nous sommes encore loin du compte. Il y a un vrai problème sur la question de l’appréciation du phénomène, et de la réaction en conséquence pour la mise en protection. Je l’ai constaté
moi même il y a quelques semaines, confronté à une victime qui m’appelle au secours. Moi, l’agent de probation qui suit l’auteur. Mon devoir de réserve m’oblige. Je ne peux aller plus loin. Mais des choses m’ont choqué, je ne suis pas ressorti indemne de cet épisode. Il nous faut
continuer de sensibiliser tous les acteurs; tous. Du commissariat aux personnels d’insertion et de probation, en passant évidemment par les magistrats. Il faut un vrai plan de formation des personnels de probation dans la prise en charge des auteurs. Il faut des moyens pour
leur accompagnement. Humains, pour leur suivi. Je fais régulièrement des journées de 10 heures par jour. Je ne triche pas. J’arrive à m’investir sérieusement sur certaines situations. Mais que pensez vous que je puisse, que mes collègues puissent faire, avec plusieurs dizaines
de personnes à suivre et accompagner. Entre des dizaines de rapports hebdomadaires à rédiger, d’incidents à gérer, de solutions à trouver, de commandes institutionnelles à honorer, chaque jour, chaque semaine...
Moyens humains en terme de psychologues, de psychiatres, d’addictologues dans nos prisons et en ville. Des moyens d’attente pour un RDV, qu’attendez vous d’eux et de nous dans ces conditions , Moyens matériels pour éloigner les auteurs de leurs victimes,
elles qui n’ont pas à subir de doublés ou triples peines en devant se cacher (hébergement...). Des moyens et de l’information pour l’accès aux associations de victimes. Il faut éclaircir, sensibiliser et peut être simplifier les procédures de protection de type BAR/TGD.
Il faut des magistrats, des greffiers dans les tribunaux pour juger et condamner plus vite et mieux. Apprécier plus finement dans la décision d’individualisation de la peine. Réagir plus vite en cas de défaillance de l’auteur en probation. Assez de baratin sur les pseudos
efforts de recrutement de contractuels. Il faut mettre les moyens pour la construction d’outils d’évaluation structurés pour la prise en charge des auteurs par les SPIP; assez de baratin aussi, dans la profession, sur le sujet. Il faut décloisonner au sein de la justice, et
décloisonner entre justice et police.
Merci aux syndicats de police de balayer devant leur porte, la situation et les épreuves qu’ils traversent m’obligent au silence. Mais chacun a ses responsabilités, et il y a de quoi dire... Et le boulot de prévention en amont est énorme...
... à l’école, dans les familles. Le patriarcat est une saloperie qui infuse au quotidien, encore et toujours. Il y a tant à faire. Il est normal que des inspections soient diligentées. Nous ne sommes pas au dessus de tout. Il faut questionner, réfléchir, partager.
Mais je vous en prie, ne tombons pas dans les pièges de l’émotion et de la colère. Elle ne mènera à rien d’autre que des réponses politiques d’urgence, factices, non réfléchies, et donc à côté du sujet. Jusqu’au prochain drame. Mes pensée vont encore une fois, et d’abord, vers
Chahinez; et toutes les victimes. Je m’autorise aussi à penser aux professionnel.le.s, aux femmes et aux hommes, qui sont pointé.e.s du doigt, pour satisfaire les instincts les plus primaires. J’ai une idée assez précise de ce qu’ils vivent ce week end. Et une chose, une dernière
que les esprits pourtant les plus posés semblent avoir tendance à oublier. Notre marge de travail et de progrès est immense. Évaluons, dégageons des moyens et avançons. Mais nous pourrons dégager les milliards que nous voudrons, recruter des millions de personnels, construire des
millions de prisons... croire que nous ne serons plus frappés par ce genre de drame est une naïveté coupable. Elle aveugle, elle dilue, elle ralentit notre action.
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