J'ai pu lire ici et là, des propos selon lesquels franchement, ces fonctionnaires qui refusent les contractuels sont des arriérés corporatistes. OK je caricature mais permettez moi de partager un ressenti vis à vis de ce recrutement. Parce que le fond du problème n'est pas là.
Je ne parlerai que du personnel de greffe. Il y a une levée de boucliers contre ces nouveaux «sucres rapides». Elle a plusieurs sources mais en ce qui me concerne, comme je l'ai déjà dit, je n'ai rien contre les personnes qui occupent ces postes. Il y en aura des bons et des
mauvais, c'est aussi le cas chez les fonctionnaires. Je regrette par contre ce recrutement fait à la va vite, annoncé d'abord dans les médias plutôt qu'aux juridictions, sans aucun projet d'avenir ou de réflexion sur le système judiciaire actuel. Ce dernier est exsangue.
La charge s'accroît pour tout le monde, magistrats et personnel de greffier. Mais plutôt que de mener une vraie et longue réflexion, on dégaine les contractuels. Comme si ça répondait à tout.

Aujourd'hui, quasiment un greffier sur deux a le même niveau d'étude qu'un magistrat.
En 2015, les greffiers ont alerté, manifesté mais nous sommes, à mon sens, passé à côté d'une chance inouïe : celle de repenser notre métier. Aujourd'hui axé sur des tâches de secrétariat, il devrait retrouver ses lettres de noblesse.

Nous sommes sensés être les premiers
collaborateurs des magistrats que nous assistons. C'est écrit dans nos statuts. L'assistance ce n'est pas faire les copies, la maintenance informatique ou faire le café. C'est penser à dire à mon JLD de perm de penser de notifier au poursuivi qu'il a le droit de se taire.
Je suis garde fou, authentificateur, procédurier. Je sais chercher dans un code et le fais souvent. Je sais quand un dossier est irrecevable, quand nous sommes incompétents. Très souvent, nous l'indiquons à notre juge avant l'audience.
À la perm, des collègues donnent des instructions quant aux poursuites selon des directives données par le magistrat. Au correctionnel, on va signaler un problème sur une COPJ qui peut entraîner une décision de «tribunal non saisi».
Nous sommes vigilants, de vraies sentinelles. Alors aujourd'hui, en fait, nous sommes blessés dans notre fierté de greffiers car on préfère recruter des contractuels plutôt que de repenser notre métier. Nous valoriser, nous replacer auprès des magistrats en renforçant
le recrutement d'adjoint administratif, indispensable pour abattre le travail de secrétariat.

L'Espagne, l'Allemagne offrent aux greffiers une autre place, bien plus importante, en tant qu'acteur à part entière de la Justice. On pourrait s'en inspirer mais à la place on
colle des rustines. La reforme de 2015 suite au mouvement est un échec que l'on refuse d'admettre en haut lieu mais qui est une réalité de terrain.

Alors des contractuels pourquoi pas, mais avant, ne peut-on pas repenser les choses en profondeur ?
J'ai la faiblesse de croire que cette levée de bouclier est aussi l'expression d'un personnel judiciaire mal aimé, méprisé par son propre ministère. Mais qui aime ce qu'il fait et tente, par tous moyens de le faire bien.

Fin. #teamgreffier
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