Tiens, j'ai envie de vous faire un petit thread ce matin sur un truc que j'évoque dans cet article, mais que je n'ai pas eu la place de développer.
Il s'agit de l'importance qu'a pris la plateforme @hypothesesorg (←
) dans mon travail d'enquête ces dix dernières années. https://twitter.com/laspic/status/1386978681768325121
Il s'agit de l'importance qu'a pris la plateforme @hypothesesorg (←

Il a déjà été dit ici et là en quoi la pratique du blogging scientifique génère des nouvelles manières de faire de la science : montrer la science en train de se faire, renouveler la discussion entre pairs, valoriser les écrits intermédiaires, etc.
Hypo est de ce point de vue un super lieu d'expérimentation. Mais pour moi, ce qui la distingue des autres plateformes de blogging, c'est cette espèce de "certification" scientifique qu'elle donne aux contenus qu'elle héberge, qui tient aux institutions auxquelles…
… elle est adossée, à l'écosystème OpenEdition, à sa réputation générale, etc.
"Certification" n'est peut-être pas le terme le plus adéquat, mais c'est vraiment cette idée de donner au lecteur des garanties.
"Certification" n'est peut-être pas le terme le plus adéquat, mais c'est vraiment cette idée de donner au lecteur des garanties.
Cette forme de certification a été cruciale dans mon enquête à l'Assemblée. Alors que j'étais jeune chercheur, sans publications, avec un pauvre page web sur un site de labo tout pourri, j'ai rencontré un vrai problème de crédibilité quand je m'adressais aux députés.
Je ne leur jette pas la pierre, hein. Les étudiants attirés par le fonctionnement de l'institution, il y en a un paquet. Ils doivent donc trier. N'ayant pas fait Science Po, et n'ayant aucun contact familial ou amical dans la place, je passais donc après tout le monde.
S'est donc posé la question pour moi de comment convaincre que mes demandes d'entretiens ne cachaient pas une demande d'embauche comme collab, que j'attendais d'eux qu'ils me consacrent du temps sans en avoir soi-même l'intérêt, et qu'ils me fassent confiance sans garanties.
J'ai fini par comprendre qu'en présentant comme un scientifique, je ne pouvais arriver à rien si je ne possédais pas les attributs qui sont ceux du chercheur. Et sur ce plan, rien de mieux qu'être lisible pour être crédible. En tant que jeune chercheur, sans réputation établie…
… et sans publications à mon actif, l'idée d'un carnet de recherche Hypo s'est présentée comme la seule piste possible. J'ai donc investi mon carnet d'abord pour me façonner une identité de chercheur crédible, à la destination expresse des députés, collabs, fonctionnaires, etc.
J'ai travaillé la présentation, rédigé des billets relativement neutres, mis en scène mon intérêt pour l'Assemblée. Puis, je me suis attaché à indiquer (pas très) subtilement l'URL de mon carnet dans mes courriers, et sur une carte de visite spécialement créée pour l'occasion.
Résultat : ça a fonctionné au-delà de mes espérances. Non pas que toutes les portes se sont magiquement ouvertes, mais j'ai réussi à en ouvrir assez pour mettre un premier pied dans l'institution et faire connaître mon projet de recherche. J'ai même appris ensuite à faire…
… évoluer cette mise en scène pour ouvrir certaines portes, m'intéresser à certains types de questions. Je me souviens par exemple d'une fonctionnaire qui avait imprimé mon dernier billet le jour d'un rendez-vous pour en discuter avec moi.
Au final, ce carnet est devenu un outil méthodo de premier ordre dans mon travail de thèse. Il est rien de moins que mon moyen d'accès au terrain. Ce qui pose plein de questions passionnante sur ce qu'est un "terrain" (sur ce point, je vous invite à lire l'article sus-cité).
[Nota : si je pense vraiment que l'identité numérique des ethnographes tend à devenir un réel enjeu de méthodo, il est vrai que dans mon cas, le succès d'une stratégie basée sur un carnet de recherche Hypo tient beaucoup aux particularités du monde parlementaire où…
… 1/ la crédibilité de chacun tient beaucoup à la capacité à assumer une posture publique ; 2/ les individus possèdent un haut niveau d'études et sont curieux de la manière dont eux et leur institution sont perçus ; 3/ du fait d'enjeux locaux liés au numérique à partir de 2010.]
Bref, et tout ça pour dire : merci @hypothesesorg !
Merci pour d'être une plateforme unique, merci aux petites mains invisibles pour l'immense travail accompli en arrière-plan, merci de nous donner des moyens de faire notre travail.
Longue vie à toi !
Merci pour d'être une plateforme unique, merci aux petites mains invisibles pour l'immense travail accompli en arrière-plan, merci de nous donner des moyens de faire notre travail.
Longue vie à toi !
