[THREAD] On m’a posé la question hier, mais à quoi donc ça peut bien servir d’avoir une pointe à l’avant une pointe à l’arrière sur beaucoup de lances dans l’Antiquité, c’est pas un peu dangereux c’thistoire ?

Un thread plein d’as de trèfle qui pique ton coeur, Caroline.
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Tout d’abord, c’est quoi une lance ?

Basiquement, un bâton avec une pointe au bout. Dans l’Antiquité on retrouve plein de modèles différents avec une pointe en fer ou en bronze, on appelle ça un fer de lance.
Un fer, pas toujours en fer donc, vous suivez ?

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C’est une arme universelle parce qu’elle permet une escrime efficace et une attaque/défense groupée en formation. Mais surtout parce qu’elle n’est pas chère, c'est une pointe au bout d’un bâton !

Le métal est cher, une arme qui en utilise un minimum, c’est merveilleux.

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En plus de ça, un fer de lance basique peut se produire en moins de 10mn, autant vous dire que pour équiper rapidement une armée de Jean-Michel guerrier du dimanche, c’est une aubaine !

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Une arme fiable, solide, adaptable à de multiples matériaux, situations tactiques, terrains, combattants… c’est clairement une des armes qui pourrait concourir au poste d'arme la plus utilisée de tous les temps.

Et on ne parle pas de son utilisation à la chasse aussi !

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Côté fer, on en retrouve de toutes tailles, de toutes formes, très effilés comme très larges, tranchants ou non, lourds, légers, à pointes supplémentaires, bref c’est la fête, chacun fait sa sauce selon ses ptits besoins.
(Ici des modèles gaulois d'Alésia, EN BOURGOGNE)

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Et donc, régulièrement on retrouve sur les lances une autre pointe, située de l’autre côté du bâton (qu’on appelle une hampe). Cette autre pointe, c’est un talon ! Comme sur le pied oui...

Là encore, il existe plusieurs formes.

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Les modèles gaulois de la guerre des Gaules par exemple sont assez simples, des cônes basiques plus ou moins pointus.

Ici des modèles assez longs retrouvés dans les fouilles archéologiques de la bataille d’Alésia, toujours en Bourgogne.

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Sur les simples cônes pas très effilés, on a la première utilité du talon : pouvoir faire reposer ou planter la lance au sol sans abîmer la hampe en bois. C’est tout bête, mais cela permet un entretien plus facile de l’arme, et d’augmenter sa durabilité !

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Autre option, sur les lances des guerriers grecs on retrouve un talon beaucoup plus ambitieux.

De forme souvent pyramidale très pointue, clairement il n’est pas là pour la déco, et a plusieurs utilités. On retrouve ça sous le nom de sauroter.

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Quand un talon dépasse le simple cône non effilé, il sert d’abord de contrepoids. Et oui, la lance à cette époque se manie à une main, avec un bouclier !

Donc un poids en métal au bout d’un bâton, à bout de bras...ça pèse.

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Avec un talon comme contrepoids, plus aucun soucis, Leonidas peut manier sa lance au bon point d’équilibre.
Elle lui paraîtra très légère et ses ptits camarades et lui-même vont pouvoir maraver du perse pendant des jours en se fatiguant un minimum !

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Autre intérêt, si vous avez renversé une formation ennemie, il suffit de planter les blessés au sol pour les achever et éviter de se retrouver avec des problèmes, ou devoir rompre la formation pour effectuer cette opération.
Moins on se baisse, moins on se fatigue...

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Oui, on rigole on rigole, mais c’est quand même fait pour la bagarre ces choses là, pas pour le tricot !

Pareil, si votre fer de lance casse, il vous reste toujours de quoi vous défendre.
Les armes de poings comme les épées sont LOIN d’être systématiques !

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La lance, c’est parfois votre seule arme. Autant qu’elle puisse prendre en compte une casse éventuelle !

Dernier intérêt : le talon peut également se planter dans le sol comme appui, bien utile pour les charges un peu agressives.

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Parce que si le premier rang plante sa lance dans le sol, que le second voire le troisième arrive à faire dépasser les fers pour créer un mur de pointes, bizarrement la charge en face elle a moins envie de se prendre tout ça dans le nez. Bizarrement !

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Mais oui mais alors me direz-vous, comme Jean-Michelos le guerrier grec fait-il pour ne pas mettre son talon dans le nez de son voisin de derrière ?

Son talon de lance hein, pour celui du pied la capoera n’existait pas encore. Ni Chuck Norris... je crois.

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Là dessus, plusieurs hypothèses coexistent.

Déjà, certaines représentations de combat sur beaucoup de vases grecs sont claires : il suffit de tenir la lance en hauteur, et piquer vers le bas.
Le talon reste donc au dessus de son ptit camarade de derrière, ouf.

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Autre hypothèse, des rangs alternés.

C'est-à dire que chaque guerrier sur une ligne est décalé avec le guerrier devant lui. Comme ça, il peut faire passer sa propre lance entre les deux guerriers de devant, et son talon entre les deux guerriers de derrière. Facile !

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Dans cette posture, au pire le talon repose sur le bouclier du gars de derrière. Pratique, solide, mortel.

Concernant les gaulois, la chose est incertaine parce que nos connaissances leurs formations reposent essentiellement sur des indices minces et donc des hypothèses.
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On sait qu’ils faisaient des formations mais combien, lesquelles et dans quel contexte, de quelle manière… tout cela c’est soumis à discussions.
Et tous ceux qui en discutent, étudient et expérimentent ne sont pas toujours du même avis !

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Il est donc très difficile de déduire un maniement de lance spécifique de formation que nous connaissons peu, à part appliquer les principes grecs que les gaulois auraient récupérés à leur compte.

De toutes manières, il y a moins de talons de lance chez les gaulois.

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Pour avoir beaucoup testé, l’importance du talon comme contrepoids n’est vraiment pas à négliger, cela peut faire toute la différence sur un combat qui dure un peu trop, le bras se fatigue vite, alors qu’avec un talon, tout devient plus facile !

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Les macédoniens d’Alexandre le Grand l’avaient d’ailleurs bien compris ! ayant pour leurs phalanges abandonné la lance classique pour un modèle de plusieurs mètres de long (=une sarisse), ils ont dû mettre un contrepoids beaucoup plus important à l’autre bout du fer ^^

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Pour résumer :
- ça protège la hampe
- ça vous économise pendant le combat
- ça vous évite de vous baisser
- et de mettre en danger votre formation
- ça permet de mieux encaisser des charges violentes
- ça vous sert d'arme de secours

Bref, c'est vraiment TRES utile !

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Merci d'avoir suivi ce thread !
Je rappelle qu'une lance ne se lance pas, qu'Alésia est en Bourgogne, et un jour je vous parlerai de l'exemple historique de double lance...

Et bien sûr, j’espère que le RT n’est pas votre talon d’Achille ! (J'aime l'humour)

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