Quand les enquêté-es font scandales… et pallient au manque de controverse scientifique.


Déroulez pour un excellent thread sur la diversité des réactions de fans de Kpop à la publication d'une enquête aux méthodes discutables, et les réactions des chercheur-ses concerné-es. https://twitter.com/LanguesdeCha/status/1386747725086081027



C'est assez génial, car une grande partie des remarques faites par les enquêté-es s'apparentent à des critiques "internes" = rappeler aux chercheur-ses les exigences et contraintes méthodologiques qu'ils/elles disent respecter au nom de la science (alors qu'en fait bof).
Autrement dit, dans ces critiques, ces fans se substituent aux pairs. Ce qui semble particulièrement nécessaires, étant donné que le champ en question semble s'appuyer sur des revues où la controverse scientifique/évaluation est largement mise sous le tapis.
(Autrement dit encore : certain-es fans se montrent meilleures chercheur-ses que les chercheur-ses ! Au-delà de la controverse scientifique, cela pourrait bien conduire à un scandale sur la manière dont se fait la recherche dans certains champs ! Ce qui est sain et souhaitable).
Ce qui est également passionnant, c'est que bon nombres de remarque des fans sont des critiques "externes" = des critiques qui n'ont rien à voir avec les attentes scientifiques. Du genre "arrêtez de nous prendre pour des rats de laboratoire !" ou "ya des gens qui bossent sur ça?"
Là, ce qui est intéressant, c'est que les chercheur-ses disent majoritairement "Mais on est fan aussi !".
Une autre réaction possible serait un réflexe corporatiste "C'est notre job, vous allez pas nous apprendre notre travail ! Taisez-vous et laissez-vous enquêter !"
Une autre réaction possible serait un réflexe corporatiste "C'est notre job, vous allez pas nous apprendre notre travail ! Taisez-vous et laissez-vous enquêter !"
Qu'il s'agisse de critiques internes ou externes, ce qui est en jeu, c'est la question de l'autonomie des chercheur-ses.
Par réflexe corporatiste, on aurait tendance à dire "on est des experts de notre domaine, donc laissez nous faire, on revendique notre autonomie !"
Par réflexe corporatiste, on aurait tendance à dire "on est des experts de notre domaine, donc laissez nous faire, on revendique notre autonomie !"
Sauf que bon, là, dans le cas de ces chercheur-ses, l'expertise est discutable. Et l'on ne peut que souhaiter que des enquêté-es se mobilisent pour pointer du doigt un champ de recherche qui montre des signes de faiblesses scientifiques.
Mais quid des critiques qui vont + loin ?
Mais quid des critiques qui vont + loin ?
Faut-il ignorer les critiques externes, qui remettent en cause l'intérêt même d'une recherche ?
Faut-il ignorer ça, en nous drapant dans notre sacro-sainte expertise, tout en revendiquant notre autonomie de chercheur-ses ?
Faut-il ignorer ça, en nous drapant dans notre sacro-sainte expertise, tout en revendiquant notre autonomie de chercheur-ses ?
Je ne pense pas. Si ces critiques sur la posture de recherche sont si récurrentes (je vous invite à aller voir les retweets commentés du thread de @LanguesdeCha pour voir à quel point ces retours est prédominante), c'est qu'elles signifient quelque chose.
Selon moi, c'est le signe d'un décalage entre nos ambitions (faire des enquêtes pour apporter un savoir à la société) et nos pratiques (les gens voient pas ce que ça leur apporte, à part avoir l'impression de faire l'objet de moqueries et/ou payer des impôts faire ces recherches)
Et là, on a une responsabilité là-dessus. Si ce décalage est ressenti, c'est probablement aussi parce que nous autres chercheur-ses, nous avons :
1/ Bien du mal à diffuser nos travaux et nos résultats pour montrer la pertinence de nos objets auprès des publics.
1/ Bien du mal à diffuser nos travaux et nos résultats pour montrer la pertinence de nos objets auprès des publics.
2/ parfois aussi du mal à proposer une analyse/critique sociologique qui ne soit ni misérabiliste, ni populiste. Et que se cacher derrière son expertise ne garantie pas que les enquêté-es reçoivent mal la restitution des résultats.
(cf. ce cas > https://www.cairn.info/revue-geneses-2008-2-page-148.htm)
(cf. ce cas > https://www.cairn.info/revue-geneses-2008-2-page-148.htm)
3/ du mal également à contrôler l'ensemble des productions scientifiques, au risque que des recherches toutes pétées s'appuient sur des institutions pseudo-académiques qui peuvent faire passer l'ensemble d'une discipline pour des clowns.
En bref, écoutons les critiques formulées par les enquêté-es, plutôt que de brandir notre expertise. Car ce sont justement ces critiques qui peuvent nous permettre de renforcer notre autonomie, si on est suffisamment malin pour s'en servir afin de corriger nos erreurs/maladresse.
Merci encore @LanguesdeCha pour ce thread passionnant et documenté ! C'est vraiment un super exemple de controverse ! :)
(et oui, ce gif. Parce que pourquoi pas, après tout. Je suis autonome de toute façon !)
(et oui, ce gif. Parce que pourquoi pas, après tout. Je suis autonome de toute façon !)