1/ Il y a tant à dire sur ces quelques lignes, à commencer par ceci: il y a dix ans, Les échos était un journal avec des informations destinées aux cadres et aux décideurs, donc sans falsification et sans flagornerie courtisane.

Mais voyons.
2/ D'abord, il y a le fantasme du remède miracle et simple passé inaperçu ou, mieux, occulté par des puissances occultes ou par l'incompétence des sachants de Paris. C'est ce fantasme qui a nourri l'effet de secte Raoult l'an dernier, que rejoue Macron.
3/ En mars dernier, on pouvait en 2h de travail bibliographique comprendre pourquoi la chloroquine et ses dérivés n'avaient que des chances infimes de marcher: s'ils avaient un effet in vitro, aucun effet in vivo n'avait été observé sur les autres virus.
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5461643/
4/ Le mécanisme consiste à empêcher l'ARN du virus de sortir de l'endosome dans le cytoplasme, ce qui se fait en condition acide. Il faudrait donc rendre moins acide l'endosome. Ca marche in vitro, dans un mélange en tube à essai de virus et de cellule, mais in vivo… rien.
5/ Mais il y a un problème plus profond: il y a peu de chances d'avoir une balance bénéfice risque favorable en préventif, pour des pathologies avec un taux de mortalité aussi faible, autour de 0,5% aujourd'hui.
6/ "Le roi te touche, Dieu te guérit. Il y a là une forme de transcendance.", avait dit Bruno Roger-Petit à propos de la relation du président au peuple.
https://www.lemonde.fr/emmanuel-macron/article/2018/05/05/emmanuel-macron-sur-la-voie-royale_5294636_5008430.html
7/ Macron avait lui même théorisé "la figure du roi dont l'absence continue à hanter la démocratie française" dès 2015. On se souvient des mises en scène messianiques de sa photographe, Soazig de la Moissonnière.
8/ Peut-être est-il "sincèrement" grisé par l'image de roi thaumaturge guérisseur d'écrouelles par simple apposition des mains, que les cercles courtisans qui l'entourent de flatterie veule entretiennent. Peut-être se croit-il capable d'un discernement divin.
9/ Dans un moment où l'absence totale de capacité de raisonnement analytique, et a fortiori scientifique, de Macron et de son entourage est devant les yeux de tous, cette "fuite" complaisamment relayée par la presse traduit une forme de croyance proprement délirante.
10/ La science ne fonctionne pas par commande miraculeuse du souverain absolu ni d'un quelconque décideur: elle procède d'un travail collectif, sur la base de la liberté de recherche, avec des moyens.
Pur l'exécutif, il faut reprendre les bases: désintriquer savoirs et croyances.
11/ Cette figure grotesque du monarque omniscient qui démolit l'appareil de recherche scientifique, puis exprime son opinion sur les remèdes miracles qu'il recommande, rappelle immanquablement celle de Trump avec les injections de Javel et les flashs UV-C.
12/ Cette phrase, quand on sait que l'exécutif refuse de recevoir toute délégation de scientifiques proposant des méthodes de réduction épidémique non liberticides, reste en travers de la gorge.

On dirait plutôt que presque rien n'a été essayé qui soit fondé en science.
13/ La théorisation par les conseillers élyséens de la mise en scène abjecte du 31 mars au soir, est révélatrice: Macron est marketé en oracle révélant une vérité transcendante, en pythie de Delphes, en César indiquant "la voie au peuple".
14/ Quand tous les corps intermédiaires ont été supprimés, caractéristique du césarisme dans sa version contemporaine autoritaire et illibérale, le cynisme de cette tirade d'Epidemiok 1er laisse pantois:
"Si je ne fais pas tout, tout seul, rien ne se passe."
16/ Penser que tout repose entre ses mains, miraculeuses, et les siennes seules, qu'il est un Sauveur, un Messie…
Pire, qu'il est entouré d'incompétents, isolé dans l'exercice du pouvoir, génie incompris, ne pouvant compter que sur lui-même…

C'est une folie mégalomane.
17/ On peut supposer, à la lecture de ces fuites, que Macron s'est figé dans le masque qui avait été composé pour lui, simple produit de marketing politique, énarque IGF du bloc néolibéral repackagé en Messie ("Nouveau"). Il s'est conformé à sa caricature, par addiction.
18/ Il croit au mythe de sa toute puissance de génie créateur qui se heurte à l'incompétence de Véran et de son cabinet, incapables de mettre en œuvre, à qui il doit faire des remontrances publiques, parce qu'isolé de la société, il n'a que le regard énamouré des courtisans.
19/ Il est frappé du syndrome des rock stars qui ont besoin de la scène pour les shoots de drogues endocrines qu'elle procure, qui sombrent quand ils sont privés de leur addiction.

Il a besoin de se vivre en Epidémiolok 1er, Sauveur du peuple, dans le regard de sa Cour.
21/ Tout est merveilleux, dans un moment où les faits démontrent qu'Epidemiok 1er est rigoureusement incapable de comprendre quoi que ce soit à la dynamique épidémique. M. 100 000 morts est aux manettes…
22/ Macron, contrairement aux grands chefs d'Etat, ne travaille pas à un mythe: c'est un produit du marketing politique qui, en Zélig, se déguise pour paraitre dans une mise en scène permanente. C'est une (grande) surface de projection, vide de sens.
23/ J'extrais cette seule phrase du navrant portrait du "rebelle, seul contre tous": " A l’adolescence, ce fort en thème, un brin rebelle, rêvait de faire du théâtre, de devenir Gérard Philippe"

Edouard Philippe?
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