Isra et Miraj
L'isrâ' (en arabe إسراء « voyage nocturne », venant du verbe سرى [sara'a], « voyager la nuit ») est, pour les musulmans, le voyage nocturne du prophète Muhamed saws de La Mecque à Jérusalem.
Il est suivi par le Miraj (معراج, « échelle, ascension »), moment où, selon la tradition musulmane, Muhamed saws est monté aux cieux en compagnie de l'ange Gabriel sur une monture appelée Bouraq (بُرَاق) après être allé sur le mur du temple à Jérusalem.
La tradition situe cet événement le 27 rajab de l'an 2 avant l'hégire, soit autour de l'année 620 de l'ère chrétienne, et le commémore durant la « nuit de l'ascension » (Lailat al-Miraj).
Le voyage nocturne se fonde sur le verset 1 de la sourate 17, « Le voyage nocturne » du Coran, qui dit:
«Gloire à celui qui a fait voyager de nuit son serviteur de la Mosquée sacrée à la Mosquée très éloignée dont nous avons béni l'enceinte, et ceci pour lui montrer certains de nos Signes. Dieu est celui qui entend et qui voit parfaitement.»

— Coran, XVII, 1, Traduction D. Masson.
D'autres versets (1-18 de la sourate 53, « L'Étoile », et la sourate 71 « Noé », 19-25) ont été lus comme des compléments de celui-ci, qui décrivent le phénomène sans le nommer précisément.
L'événement est ensuite développé dans tous les grands recueils de hadith, dans les commentaires du Coran comme celui de Tabari, et dans une littérature spécialisée (kutub al-miraj, livres du miraj).
Le plus ancien est l'œuvre du chiite Hisham ibn Salim Jawaleqi, disciple des cinquième et sixième imams (Muhammad al-Baqir et Jafar al-Sadiq), et consiste en une compilation de traditions.
La littérature relative au miraj dépasse rapidement le cercle des religieux et des théologiens, et se développe ensuite comme un genre littéraire arabe (genre des qisas al-miraj, histoires du miraj), dont les plus représentatifs sont
➡️al-Isra wa'l-miraj attribué au compagnon du Prophète Ibn Abbas (m. 67/686) mais sans doute apocryphe.

➡️kitab al-miraj d'Abu'l-Qasim Abd al-Karim Qosayri (m. 465/1073), théologien et mystique shafiite
➡️kitab qissat al-miraj de Abu'l-Hasan Ahmad ibn Abdallah Bakri (VIIe/XIIIe s.), très proche du récit du pseudo Ibn Abbas

➡️al-Ibtihak bi'l-kalam ala'l-isra wa'l miraj de Muhammad ibn Ahmad ibn Ali Gayti (m. 984/1576), traditionniste shafiite.
Des éléments existent aussi dans d'autres types d’œuvres : Récits des Prophètes, histoires générales, littérature de l'apocalypse et de la résurrection, littérature des mirabilia. La biographie de Muhammad saw par Ibn Hisham et le Commentaire du Coran de Tabari détaillent ainsi
l'événement.

La littérature persane a également développé le thème du miraj dans sa poésie mystique, comme dans le Khamseh de Nezami.
L'ensemble des récits de l'isra et du miraj rapportent une même succession d'événements :

➡️Muhammad saws, qui dort à la Mecque près de la Ka'bah, est réveillé par l’ange Gabriel
➡️Il accomplit le voyage vers Jérusalem sur Bouraq, une créature surnaturelle. En route, ils rencontrent des puissances bonnes et mauvaises, visitent Hébron et Bethléem.

➡️Arrivé à Jérusalem, il rencontre les Prophètes Abraham, Moïse et Jésus, et dirige leur prière.
➡️Il monte dans les sept cieux par une « échelle » ou toujours sur Bouraq

➡️Il visite les sept cieux. Au ciel inférieur, il rencontre Adam, au second Jésus ('Issa) et Jean le Baptiste (Yahya), au troisième il vit Joseph fils de Jacob (Yusuf),
au quatrième, Hénoch (Idris), au cinquième, Aaron (Haroun), au sixième, Moïse (Moussa) et enfin, au septième ciel, c'est au tour d'Abraham (Ibrahim). Il atteint ensuite un lieu où il entend le bruit des calames qui écrivent la destinée.
➡️Il rencontre Dieu et discute avec Lui le nombre de prières quotidiennes. Moïse participe à la discussion et encourage Muhammad Saws à demander une réduction du nombre de prières de cinquante à cinq, ce qui est fait après plusieurs aller-retour,
sans que ces prières perdent de valeur.

➡️Il revient à la Mecque, où son récit est accueilli avec scepticisme par ses proches, hormis Abu Bakr.
Des détails, variantes et compléments nombreux existent dans les textes. Bukhari fait par exemple mention du Lotus des confins, Sidrat al-Muntaha et de la visite du Paradis par Muhammed saws ; certains textes évoquent aussi une visite des enfers.
Les modalités du réveil de Muhammad saws varient : parfois, l'archange Gabriel est accompagné de Michel et ouvre le toit de la maison.
L'isra et le miraj ont suscité beaucoup de commentaires et d'exégèses de la part des savants musulmans. Trois interprétations du verset XVII, 1 peuvent être distinguées.
Toutes s'accordent sur le fait que le terme abd (« serviteur ») désigne Muhammed saws et que le « Sanctuaire sacré » (al-masjid al-haram) est soit la Ka'bah, soit l'ensemble de La Mecque ;
mais elles se différencient sur l'interprétation de l'expression masjid al-aqsa (« la Mosquée très éloignée ») et sur la nature du voyage nocturne.
Une version estime que le voyage n'est pas corporel, mais une vision offerte par Dieu au Prophète ; elle se base sur le verset 62 de la sourate 17, « Le voyage nocturne ». Il semble que, aux premiers temps, le thème de l'ascension était considéré comme un thème impossible,
selon la sourate « Le Bétail », 6, verset 35.
Une autre version estime que le voyage a été effectué corporellement vers un espace céleste, que désignerait le terme « la mosquée la plus lointaine » (al-masjid al-aqsa).
Le voyage aurait donc été synonyme d'une « Ascension » de Muhammad saws. Cette version a été rapidement abandonnée après le VIIIe siècle.
C'est un texte d'Ibn Ishaq, au VIIIe siècle qui constitue la première mention connue de l'identification d' al-masjid al-aqsa à la ville de Jérusalem ; il est possible toutefois que des traditions ait existé antérieurement, mais qu'elles soient restées orales.
Cette interprétation a ensuite été la seule perpétuée dans les traditions musulmanes. La date à laquelle a été entérinée la liaison entre la mention coranique et la ville réelle, puis l'esplanade du Temple, reste toutefois sujette à débats.
Il est possible qu'elle ait été réalisée dès le règne d'Abd al-Malik (685-705), comme tendait à le montrer la sacralisation de l'espace de l'ancien Temple juif par la construction du dôme du Rocher. Elle s'expliquerait alors par des raisons politiques autant que religieuse,
les Omeyyades ayant alors cherché à augmenter le prestige de leurs territoires syriens aux dépens de La Mecque, tenue par leur rival Abd Allah ibn Zubayr.
Cette théorie serait confirmée par la symbolique architecturale du dôme, par le fait qu'à la même période est fixée la date du 27 rajab. Toutefois, l'absence du verset XVII, 1 dans les inscriptions du dôme du Rocher,
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