1/ [THREAD] La dysphorie comme critère de transidentité.

L'envie de faire ce thread me vient de ce tweet, si vous avez la flemme de lire tout ce que je vais dire, lisez au moins ce qui est écrit là. https://twitter.com/Egg_irl_bot/status/1317050466899996672
2/ Nous allons parler de l'utilisation de la dysphorie comme critère permettant de savoir si une personne est trans ou non. tl;dr : c'est de la merde.
3/ Je vais déjà commencer par dire que tout ce qui va suivre n'est que mon avis et que si vous avez des corrections ou précisions à apporter, faites donc. Je pense notamment à la non-binarité qui est un sujet vaste que je ne maîtrise pas parfaitement.
4/ Pour simplifier, je vais aussi utiliser "cis" avec le sens "dyacis". Je ne vais malheureusement pas vraiment pouvoir prendre en compte le vécu des personnes intersexes dans ce thread car c'est un sujet incroyablement vaste et ce n'est pas ma place d'en parler.
5/ Je le fais aussi dans la volonté de garder le sujet assez clair et centré sur la transidentité. Certaines choses pourront s'appliquer aux personnes intersexes (trans ou non), d'autres non. J'en suis désolée.
6/ Ensuite, un petit peu de lexique :
AFAB=Assigned Female At Birth. Une femme cis est AFAB
AMAB=Assigned Male At Birth. Un homme cis est AMAB.
AGAB=Assigned Gender At Birth. Le genre assigné à la naissance.
Dysphorie/dyspho= On parle ici de dysphorie de genre.
7/ Ma définition sera : La dysphorie de genre est le sentiment d'inconfort ou de détresse qui peut se produire chez des personnes dont l'identité de genre diffère de leur AGAB ou de leurs caractéristiques sexuelles physiques.
8/ Pour beaucoup de personnes, notamment celles en questionnement, le fait de ressentir de la dysphorie ou non permet de savoir si on est trans. Car si on en ressent pas, alors on n'est pas trans. Il y a plusieurs raisons pour lesquelles je pense que c'est une
9/ mauvaise approche.
1) Je connais plusieurs personnes ayant transitionné de leur AGAB vers un autre et étant désormais plus heureuse qu'avant, et pourtant leur AGAB ne leur causait pas de dysphorie. Leur nouveau genre leur correspond simplement mieux.
10/ 2) Il est très compliqué d'identifier la dysphorie lorsqu'on ne réalise pas être trans : Pour moi, la dysphorie c'était le dégoût de mon corps, ne pas aimer les photos, ne pas aimer mon visage, ne pas vouloir le mettre en valeur.
11/ Mais j'attribuais tout ceci à des complexes : Mon corps ne correspondait pas aux critères de beauté pour un mec, et mon visage non plus. Normal de ressentir des complexes. C'est très facile à rationnaliser.
12/ Et c'est encore pire pour les personnes AFAB ! Comment voulez-vous être 100% à l'aise avec le fait d'être une femme (ou perçue comme) dans une société misogyne pleine d'injonctions ? Y-a-t-il une seule femme cis qui n'a jamais souhaité être traitée comme un homme ?
13/ J'en doute. La dysphorie se manifeste aussi par un inconfort avec les rôles genrés attribués à la société. Encore une fois, vu ce que c'est pour les femmes, je doute qu'il y ait des exceptions à ce niveau aussi (surprenez moi ?).
14/ Et même chez les personnes AMAB, de plus en plus commencent à prendre conscience du virilisme et de la masculinité toxique, je suis sûre que beaucoup ne se sentent pas en phase avec ces attentes ridicules.
15/ 3) Il y a aussi beaucoup de signes de dysphorie qui ressemblent comme deux gouttes d'eau à la dépression (ou qui en sont, je ne sais plus). Mal qui touche de plus en plus de personnes, c'est donc très facile de penser que c'est juste ça.
16/ 4) La dysphorie, surtout lorsqu'on ne réalise pas être trans, ça peut aller et venir par périodes. C'est donc très facile de rester dans le déni le plus total en se disant que maintenant ça va donc "still cis tho".
17/ 5) Caractériser la transidentité par la dysphorie, ça nous vient de la pathologisation et la psychiatrisation de la transidentité, je ne suis pas sûre que ça soit une excellente idée de perpetuer ça car la psychiatrie est tout sauf notre amie.
18/ 6) J'ai vu tant de personnes en questionnement rejeter l'idée d'être trans car elles ne ressentaient pas de dysphorie selon elles (souvent elle n'était juste pas identifiée), doutes vites balayés quand on a commencé à aborder l'euphorie.
19/ 7) Finalement, je pense qu'il serait vraiment temps qu'on arrête d'associer la transidentité à la souffrance et la douleur.
20/ On veut vraiment que ça soit ça, notre histoire ? C'est la première impression qu'on veut donner aux personnes en questionnement ? C'est ça qu'on veut laisser en héritage aux personnes trans de demain ?
21/ Voilà pourquoi selon moi il faut arrêter de nous définir par la dysphorie : c'est pas fiable, c'est du caca, et c'est pas universel. Et là vous allez dire "Oui mais Alice, on fait comment alors ?"
22/ Il y a un critère beaucoup plus joyeux, probablement universel, et beaucoup plus fiable.

L'euphorie de genre. C'est quoi cette bête là ? C'est tout l'inverse de la dysphorie.
23/ C'est le fait de ressentir de la joie (parfois à en pleurer) et du bien-être par l'expression ou la validation d'un genre.
24/ Bien souvent, il ne s'agira pas de notre AGAB (ça peut sûrement arriver pour les personnes genderfluid j'imagine) parce qu'une personne cis n'a pas vraiment de raison d'être euphorique à propos de son AGAB, c'est normal pour elle.
25/ Et à ma connaissance, toutes les personnes trans ressentent de l'euphorie de genre lorsqu'elles parviennent à être en adéquation avec leur genre réel. Ce qui peut potentiellement rendre la tâche un peu compliquée pour certaines personnes nb, je présume.
26/ Cela peut venir de l'apparence physique mais aussi de la sociabilisation (les gens qui utilisent les bons pronoms, prénoms, etc). Par exemple, pour confirmer mes GROS doutes sur mon identité, j'ai acheté des vêtements féminisants, je me suis prise en photo, et j'ai
27/ rajouté des cheveux longs via FaceApp (Notez que FaceApp peut causer de la dysphorie car les filtres de changement de genre nous renvoient une image qu'on n'atteindra peut-être pas et qu'on peut idéaliser).
28/ C'était la première fois de ma vie que j'étais satisfaite d'une photo de moi et que je voulais la montrer à d'autres personnes. La première fois en 26 ans. J'ai ressenti une joie et un bien-être immense à ce sujet et j'ai su qui je voulais être, qui j'étais vraiment.
29/ Bien sûr, cette méthode n'est pas sans faille non plus : par exemple une personne AGAB pourrait adorer se voir avec un binder si elle ressent des complexes par rapport à sa poitrine ou en a ras le cul d'être sexualisée.
30/ Et encore une fois, dans notre société sexiste, c'est un sentiment partagé par beaucoup. Il faudrait donc par exemple s'assurer qu'on ressent aussi de l'euphorie par rapport à une socialisation différente de celle de notre AGAB, etc.
31/ Je pense qu'on arrive au bout de ce que j'ai à dire.
Pour conclure : Arrêtons de nous définir par la souffrance, faites que notre histoire soit une histoire joyeuse et heureuse.

Plein de bisous, sauf aux mecs cis.
(et hésitez pas à me donner votre feedback, même si c'est juste pour dire que vous êtes d'accord, j'ai travaillé dur et j'ai peur de dire des bêtises 😭)
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