Avec la fin de ma thèse d'école et l'été, j'ai beaucoup moins partagé des documents et anecdotes issues de ma recherche et intérêts plus large sur ce compte. Il est temps d'y remédier, avec un thread sur les représentations de sportifs dans un cadre familial et un rôle paternel

Ce thread va être lentement alimenté, un document à la fois, dans les prochains jours. Il concerne des sportifs d'Entre-deux-guerres, et je vais normalement piocher dans des exemples que j'avais retenu pour mon travail.

On commence avec cette page du Miroir des Sports (n° 306, 24 mars 1926, p. 188). On y retrouve le Tiger Flowers, le lendemain de sa victoire contre son compatriote Harry Greb lui permettant de devenir champion du monde des poids moyens.

Je reproduis ici mon commentaire, c'est plus simple que de le copier-coller sur plusieurs tweets.

Tiger Flowers défend avec succès son titre contre Harry Greb en août de la même année (1926).

Cependant, l'histoire des deux hommes se termine tragiquement. En fin 1926 pour Greb et en fin 1927 pour celui dont le nom de naissance est Theodore Flowers, ces deux boxeurs décèdent des suites de complications pendant des opérations.

[Suite du thread dans la semaine !]

Aujourd'hui, notre deuxième sportif de ce thread est le Antonin Magne. Les plus vénérables d'entre vous se souviennent peut-être de son rôle de directeur sportif auprès de Poulidor pendant les années 1960, mais "Tonin" est surtout un double vainqueur du Tour de France !

On commence par le commencement de sa vie familiale : son mariage (Le Miroir des Sports, n° 802, 11 décembre 1934, p. 500). Alors que pour la plupart des sportifs, leur mariage n'est que mentionné, avec une photographie à l'occasion des époux sur le perron de l'église...

Celui de Magne est très médiatisé dans la presse sportive. Le Miroir des Sports y consacre tout un sujet, ses photoreporters pénètrent dans l'église et dans la mairie pour le compte du lecteur. Magne est une véritable star : il a remporté en juillet son 2e TDF (le 1er en 1931).

On saute dans le temps avec cette Une du Miroir des Sports en 1936 (n° 924, 29 décembre 1936). Les numéros de fin d'année sont souvent plus familiaux, dans l'esprit de Noël. Celui-ci montre le couple Magne regardant un album photo à la lumière d'une lampe.

En 1936, après deux Tours de France difficile lors desquels il a dû abandonner dans les Alpes, Magne a su rebondir et remporter le championnat du monde de cyclisme à Berne (un jeune coureur italien, Gino Bartali, finit 7e de l'épreuve). Allez, on saute à nouveau dans le temps.

Les deux derniers documents datent du Tour de France 1938. Le premier, hâtivement numérisé à la BnF la semaine avant le confinement, est dans le premier numéro de la nouvelle revue du patron de presse Jean Prouvost, Match, au début du Tour de France 1938 (7 juillet 1938, p. 8).

Ce nouvel hebdomadaire illustré généraliste remplace Match-l'Intran (1926-38), un magazine omnisports, et précède le Paris-Match d'après-guerre. Pendant ses premières semaines, il garde un grand volume d'informations sportives.

En cette première semaine de Tour de France, il présente trois des favoris de l'épreuve : le Belge Sylvère Maes (Maillot Jaune 1936 - puis 1939), l'Italien Gino Bartali (qui va gagner ce Tour) et Antonin Magne. Il revient en images sur des épisodes de leur vie.

Pour Tonin, sa vie familiale et son épouse Germaine sont particulièrement mis en avant dans la colonne de gauche. En 1°, son mariage, en 2°, sa convalescence après sa chute en 1935 (percuté par une moto dans le Col du Télégraphe), entouré par sa famille, et en 3°,... (suspens)

La naissance de sa fille Yvette. Une semaine plus tard, on découvre dans Le Miroir des Sports une bien belle photo familiale (n° 1 014, 14 juillet 1938, p. 4). Alors que le Tour fait étape à Arcachon, où il habite, il retrouve sa famille dans le vélodrome, d'où ce portrait.

Petit détail : sur son maillot de l'équipe de , il porte sur le cœur non pas un coq, mais un crabe : le d'Arcachon, que Germaine Magne coud sur tous ses maillots ! Comme un chevalier portant les couleurs de sa bien aimée dans la joute, en somme.

[La suite un autre jour !]

Pour notre personnalité du jour, on retrouve unavec le Marcel Thil. Ce boxeur apparaît peu dans les travaux historiques, alors qu'il a été pendant 5 ans (1932-1937) champion du monde des poids moyens et est considéré par des sites spécialisés comme n° 1 du Hall of Fame

[Aparté : c'est le document qui figure en première page du tome 1 de ma thèse, c'est vous dire l'importance du bonhomme dans l'actualité sportive de l'Entre-deux-guerres (Match-l’Intran, n° 456, 7 mai 1935, p. 16)] Bon, venons-en au fil rouge de ce thread : la famille !

Il faut savoir que sa famille est très liée à sa carrière sportive : son entraîneur n'est autre que son beau-père, Alex Taitard, sur cette photo le 2e à gauche (Le Miroir des Sports, n° 932, 23 février 1937, p. 16).

Son épouse, Georgette Thil, est elle-même sportive, elle pratique l'athlétisme et le football notamment, mais a stoppé sa propre carrière en club pour soutenir celle de son mari (Match-l’Intran, n° 436, 18 décembre 1934, p. 16).

Une grande photo de famille couvre la quatrième de couverture du numéro de Noël du Miroir des Sports en 1935 (n° 863, 24 décembre 1935). La petite Danny est au centre de l'attention de ses parents et de ses grands-parents, au pied du sapin.

C'est dire l'affection de nombre de Français envers le champion et son entourage, que Noël soit ainsi représenté par cette scène du foyer Thil, sur une pleine page de couverture.

Cela confère bien sûr un visage très humain et normal à cet homme que l’on ne verrait que lors de combats de haut niveau sous les feux des projecteurs si les appareils photographiques ne s’immisçaient pas dans sa vie privée.

Lors d'un numéro de la fin de l'année précédente de l'autre grand magazine sportif (Match-l’Intran, n° 436, 18 décembre 1934), Robert Bré demande d'ailleurs à plusieurs vedettes : « Que souhaitez-vous pour vos enfants, Messieurs les champions ? »

Thil répond qu’« il n’y a pas de situations féminines bien déterminées, qu’il désire spécialement pour elle », mais il souhaite qu’elle reçoive un maximum d’éducation. À part cela, il faut juste qu’elle se marie avec « un brave homme » en espérant qu’elle-même travaille un peu.

Voilà pour ce petit tour d'horizon de Marcel Thil et de sa famille. De manière générale, les représentations de Marcel Thil hors match de boxe le montrent souvent souriant, calme, sous un jour très positif en somme, et c'est une figure très appréciée.

[La suite un autre jour ]