C'est l'histoire d'une entreprise prometteuse qui décide de se financer en s'introduisant en bourse.

(Une histoire simplifiée pour expliquer les conséquences néfastes de la spéculation).

À dérouler...
Le fondateur de l'entreprise, Léon, est persuadé que son entreprise vaudra dans quelques années 10 millions d'euros. Mais en attendant cette valorisation de l'entreprise, Léon a besoin de la développer, et pour cela il a plusieurs choix.
Soit il va voir sa banque qui a peu de chance de lui prêter car son entreprise n'est pas encore rentable.
Soit il va trouver des investisseurs privés qui sont prêts à miser une petite pièce sur lui en espérant le pactole.
Soit il introduit son entreprise en bourse...
Léon est intelligent, il choisit la bourse. Il décide de vendre initialement une fraction de sa société. Il a besoin de 100 000€ pour développer son affaire. Même s'il pense que sa société va se développer très vite et qu'elle vaudra 10 millions d'€, il est le seul à le croire.
Il lui est conseillé de valoriser sa société prometteuse à 1 million €. Il doit donc vendre 10% de sa société pour récolter les 100 000€ nécessaires. Pour cela, il divise sa société en 1 million de parts, ce sont les actions. Il décide de vendre en bourse 100 000 actions à 1€.
Cette vente initiale est l'introduction en bourse. Les banques et les fonds d'investissements souscrivent au nom de leurs clients à cette introduction pour acheter une part des 100 000 actions disponibles à 1€. Léon leur promet que bientôt l'action vaudra 10€ !
Comme il y a 1 million d'actions, si l'action monte à 10€, la société vaudra bien 10 millions ! On appelle cela en bourse la capitalisation : nombre d'actions*prix action. Grâce à la cotation en continu en bourse, la valorisation de la société est connue à tout moment !
Une fois les 100 000 actions vendues à 1€, Léon a les 100 000€ dont il a besoin pour se développer. Quand une société vend ses propres actions à des investisseurs pour récolter de l'argent nécessaire à son activité, on appelle cela le marché primaire.
Ceux qui possèdent les 100 000 actions peuvent à tout moment les vendre sur le marché organisé, c'est à dire la bourse, à de nouveaux investisseurs qui se substitueront aux vendeurs pour devenir actionnaires à leur tour. On appelle cela le marché secondaire.
Comme vous le voyez, à ce moment ce marché ne sert à rien pour Léon. Les affaires de Léon sont excellentes, ses plans marchent comme prévu, et à l'annonce des premiers résultats, il surprend tout le monde ! De nouveaux investisseurs se précipitent pour acheter l'action !
Le prix de l'action double à 2€. Les investisseurs initiaux sont heureux d'avoir doublé leur mise. Les nouveaux investisseurs espèrent revendre plus tard à un prix plus élevé, contents d'avoir misé sur Léon !
Les rumeurs courent que l'activité de Léon se développe rapidement grâce aux 100 000€ récoltés lors de l'introduction en bourse. Les acheteurs affluent sur le marché secondaire qui cote en continue de façon électronique. L'action monte, monte, monte... elle est déjà à 5€ !
Pour l'instant, seuls les acheteurs ont profité de cette folie boursière. Léon n'a récolté que 100 000€. Mais il lui reste 900 000 actions en main. Il est potentiellement riche de 4.5 millions s'il vend tout aujourd'hui. Mais il croit en son idée, et il préfère cibler les 10€ !
L'action continue de monter... Fort de ce succès boursier, Léon mandate une banque d'investissement pour vendre 100 000 nouvelles actions qui seront spécialement créées pour l'occasion. Cette fois, le prix de vente est de 5€ et non de 1€. La société récolte 500 000€ !
Cette opération est une augmentation de capital, car le nombre d'actions augmente, il y a maintenant 1.1 million d'actions en circulation. 900 000 chez Léon, 200 000 dans les mains des différents investisseurs.
Les affaires continuent de surprendre tout le monde, dépassant largement les estimations des plus optimistes, dont Léon. L'action monte à 20€. La banque prête même de l'argent aux investisseurs pour qu'ils achètent des actions en s'endettant : on appelle cela l'effet de levier.
À 20€, la société vaut 22 millions ! Bien plus que les 10 millions d'€ initialement rêvés par Léon. Avec ses 900 000 actions, il est potentiellement riche de 18 millions d'€ ! Pour l'instant il n'a pas profité personnellement de la folie boursière, seule la société l'a fait.
Il décide d'acheter une maison qui vaut 1.6 million d'€ ! Mais sa banque qui croit enfin en lui, lui conseille de vendre que 400 000 actions à 20€ pour toucher 800 000€, et de prendre un crédit pour 800 000€. Comme cela il conserve 500 000 actions, au lieu de 100 000...
Léon n'aime pas les crédits, mais il est pris dans l'effervescence ambiante, et accepte la proposition. Si l'action monte à 80€, il ne devra vendre que 100 000 actions pour rembourser son prêt, et il lui restera 400 000 actions en main, soit un joli pactole de 3.2 millions !
Léon accepte au bonheur de la banque qui va toucher des commissions pour la vente des 400 000 actions, et des intérêts pour le crédit partiel sur la maison. En plus, elle finance aussi ses clients qui achètent les actions de Léon par endettement ! C'est le bonheur ! L'euphorie !
70€ ! L'action continue de monter au bonheur de Léon, des investisseurs et des boursicoteurs qui viennent d'entendre parler de la société. La banque se frotte les mains depuis le début : commissions sur les ventes d'actions et sur les crédits qui permettent l'effet de levier.
Léon est à 10€ du bonheur. Bientôt il va pouvoir vendre des actions à 80€, rembourser son prêt et enfin être riche. Les boursicoteurs et les nouveaux investisseurs ne connaissent pas vraiment l'activité de Léon mais ils comprennent que l'action monte et qu'ils s'enrichissent.
Et puis soudainement, en pleine euphorie, c'est la crise à cause d'un évènement imprévu ! C'est le krach en bourse. Toutes les actions baissent dont celle de Léon. Les prévisions économiques sont catastrophiques. C'est le retour à la réalité.
La banque est inquiète. Elle a donné des crédits à de nombreux spéculateurs, qui sont obligés de vendre les actions dans la panique. Mais bientôt les cours seront trop bas, et mettent à risque le remboursement des crédits, et la banque avec. C'est la désillusion !
Léon, comme tous les propriétaires de logements à crédits est inquiet. L'action est massacrée en bourse, elle ne vaut plus que 5€. Même s'il vendait toutes ses 500 000 actions, il ne recolterait que 250 000€. On est bien loin des 400 000€ empruntés !
La banque a tellement prêté aux spéculateurs, qu'elle n'arrive plus à prêter aux PME, artisans et restaurateurs qui ont un fort besoin de trésorerie pour passer l'orage !
Tout le monde est inquiet : non seulement les banques risquent de faire faillite mais en plus elles risquent d'entraîner l'économie réelle avec elles. Les hommes politiques sont aussi inquiets : ils ont peur de ne pas être réélus, voire même de subir une révolte populaire !
Les banques menacent de ne plus prêter à l'économie réelle, surtout que ses activités de trading sont en train de subir d'énormes pertes. Les cours des actions sont tellement bas que même s'ils vendaient tout, les investisseurs n'arriveraient pas à rembourser leurs dettes.
Si la Banque centrale ne sauve pas les banques qui ont nourri la spéculation, les spéculateurs risquent de faire faillite entraînant la banque avec eux. La banque centrale infestée d'anciens banquiers se doit d'agir pour sauver le monde de leurs amis dont ils sont eux-mêmes issus
Profitant de la panique ambiante et de l'anxiété des dirigeants politiques et des gens ordinaires, la Banque centrale décide d'injecter en urgence des milliards dans les marchés financiers. De l'argent créé à partir de rien en tapotant simplement sur un clavier d'ordinateur.
Peu importe si cette décision est inéquitable car elle va sauver en premier lieu les cupides de la finance. Peu importe si cette politique va entraîner une hausse de la bourse et creuser injustement encore plus les inégalités.
Peu importe si cette politique entraîne la hausse de l'immobilier qui pénalise les jeunes générations. Peu importe ! Car il faut le faire. Il faut sauver nos amis les banquiers, nos amis financiers, nos amis les cupides.
Les cupides de ce monde ont mis l'économie réelle en danger mais ils seront sauvés, ils ne paieront pas leurs multiples erreurs. Ils ont de la chance d'être proche du pouvoir monétaire ! Pas comme tous les autres gens ordinaires qui triment quotidiennement sans broncher.
Pire les cupides financiarisés s'enrichiront encore plus ! De quoi acheter nos médias, nos élections, notre démocratie !
En attendant, rien ne sera fait pour encadrer l'industrie du crédit qui sert la spéculation financière au lieu de servir l'investissement productif, la recherche et l'innovation, l'économie locale et la transition écologique !

FIN !
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