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Ces affaires sont souvent mises en avant par la droite : scandale ! Le pauvre couple viré de chez lui par d'affreux squatteurs ! La loi ne protège pas assez les propriétaires ! Ca pourrait vous arriver ! MAIS :
Systématiquement, ces articles n'interviewent qu'une des parties : les propriétaires. C'est le cas ici. On n'a aucune confirmation de leur histoire, on doit leur prendre pour argent comptant. Souvent, après les premiers articles, l'affaire se révèle être toute autre.
Par exemple souvent les "squatteurs" sont en fait des locataires victimes de propriétaires peu scrupuleux, de marchands de sommeil qui veulent les chasser de chez eux car ils ne paient pas assez cher à leur goût. https://www.lexpress.fr/actualite/societe/fait-divers/squatteurs-ou-locataires-la-parole-d-un-proprietaire-chasse-remise-en-cause_1984102.html
Dans d'autres cas les "squatteurs" sont des locataires parfaitement en règle, parfois avec un arriéré de loyer, et qui ont face à eux un propriétaire qui veut les expulser, mais ne le peut pas car ils ont un bail et que la loi les protège, mais ne protège pas des squatteurs.
Il arrive aussi que les squatteurs soient des vrais squatteurs. On s'aperçoit alors occasionnellement que la "petite maison de vacances" est en fait une demeure abandonnée depuis des années, qu'ils ont parfois améliorée et remise aux normes à leurs frais. https://www.liberation.fr/societe/2015/05/08/maryvonne-la-proprietaire-delogee-par-des-squatteurs-qui-excite-l-extreme-droite_1299214
Ces affaires cachent en fait la forêt des abus des propriétaires, qui s'estiment tout puissants parce qu'ils possèdent un bien, et estiment que la moindre nécessité de respecter le droit de leur part est un abus et une oppression. https://www.midilibre.fr/2012/03/09/pere-et-fils-expulsent-a-leur-facon-le-locataire-indesirable,468469.php
Or, la réalité, c'est que ces affaires médiatiques sont souvent une manière de se faire justice soi-même aussi. Quitte, occasionnellement, à engendrer des violences quasi-maffieuses contre des gens parfaitement dans leur droit. https://observers.france24.com/fr/20110726-montreuil-rue-caillots-casseurs-squat-propriete-violences-deloger-commando-voynet-mairie-lettre
Je note que dans l'affaire citée par Emma Ducros, il y a plusieurs éléments qui mettent la puce à l'oreille : les fameux "squatteurs" (que personne n'a jugé bon d'interviewer) auraient dit aux propriétaires qu'ils ont récupéré un jeu de clé chez une personne mystérieuse.
Par ailleurs, comme le nom de la victime supposée est donnée, on peut aisément vérifier que c'est un entrepreneur gagnant sa vie en... louant des biens. Qui dit en interview que la fameuse "maison de vacances" est "son gagne-pain".
Notez : je ne sais pas ce qu'il en est. Je remarque juste qu'on est en train de prendre la version d'une des parties dans un conflit, un conflit d'un genre où l'on sait qu'il y a eu des mensonges précédemment, et qu'on dit "C'est la vérité", sans donner la parole aux accusés.
Je ne suis pas un Hercule Poirot en culotte courte, capable de résoudre le mystère du pavillon de Théoules depuis son canapé. Je suis juste intrigué.
Et quand bien même ce serait le cas. Imaginons que l'on ait effectivement affaire à "des squatteurs qui connaissent bien leur fait", qui soient donc arrivés dans ce qui est un petit village des Alpes Maritimes en quête d'une maison à infiltrer, aient réussi par on-ne-sait quel
procédé à se doter d'un jeu de clés, aient ensuite investi les lieux et changé les serrures, et soient actuellement en train de rire de leur coup maléfique dans le salon qu'ils occupent illégalement. Imaginons que toute cette version des faits soit vraie.
Est-ce que la chose qui "ne tourne pas rond dans ce pays", comme dit Emma Ducros, ce ne serait pas qu'un couple avec enfant ait à recourir à de tels procédés pour se loger ?
Autre question : si c'est le cas, que subit ce pauvre retraité ? La loi est de son côté, il doit juste attendre qu'un huissier constate l'offense et, les squatteurs n'étant pas protégés par la loi, ils seront expulsés. La situation kafkaïenne dans laquelle il se trouve est, dans
le pire des cas, de ne pas avoir pu passer deux semaines en août dans sa maison de vacances, et d'avoir dû attendre que la police agisse plutôt que de chasser un couple avec enfants à la chevrotine.
Je comprends que c'est emmerdant, mais l'alternative c'est quoi ? Vous vous sentiriez à l'aise que votre propriétaire doit avoir le droit de vous virer manu militari de chez vous parce qu'il faut le croire sur parole quand il dit que vous êtes un "squatteur", et on verra après ?
Dernière chose : vous avez remarqué que vous n'avez pas un article à chaque fois que quelqu'un se fait expulser de son logement. Je ne parle même pas des cas de mauvaises pratiques de la part des propriétaires. Des travaux pas faits, des dossiers absurdes. Des proprios qui se
permettent d'entrer dans le logement de leurs locataires sans demander "pour vérifier un truc" (à propos si vous êtes locataire quelqu'un détient une clé permettant d'entrer dans l'endroit où vous rangez toutes vos affaires, feeling safe yet?). J'en passe et des meilleures.
Je me permets de conclure en évoquant une réelle affaire de squatteurs.
33 familles, leur droit au logement reconnu.
La préfecture de police veut les mettre à la rue.
Certaines ont des enfants.
Et pour quoi ? Pour un hôtel de luxe. https://www.leparisien.fr/paris-75/paris-les-squatteurs-de-l-ex-commissariat-bientot-expulses-08-06-2020-8331774.php
33 familles, leur droit au logement reconnu.
La préfecture de police veut les mettre à la rue.
Certaines ont des enfants.
Et pour quoi ? Pour un hôtel de luxe. https://www.leparisien.fr/paris-75/paris-les-squatteurs-de-l-ex-commissariat-bientot-expulses-08-06-2020-8331774.php
Je n'ai pas vu Emma Ducros et sa joyeuse petite bande de libertarien prétendument rationalistes dire que mettre des enfants dans la rue au milieu d'une pandémie pour construire un hôtel qui restera vide parce qu'on est au milieu d'une pandémie ça "ne tourne pas rond".
