Pour se changer les idées par ces temps obscurs pour la Science, je vous propose une petite parenthèse qui me permettra aussi de fêter mes 5000 abonnés. Je vais vous parler d’un article qui couple deux choses que j’aime bien : le surf et la notion de Flow.
Pour commencer ce thread un peu "feel good", je vais vous présenter les principaux éléments, du surf (ci dessous) et du flow. Bon, le surf ça va être simple, c’est ce qu’on retrouve ci-dessous. Après, il existe différentes pratiques dans le surf, du fish au longboard.
Bon, revenons à la psychologie avec une autre notion, le Flow …Mais de quoi parle-t-on exactement ?
C’est un concept qui vient de la psychologie positive et qui a été proposé dans les années 70 par Csikszentmihalyi (prononcé Chicks-sent-me-high ).
On parle de quoi ? Pour Nakamura & Csikszentmihalyi, (2002), c’est un état de concentration intense, d’absorption intense, d’engagement profond dans la tâche. Dans cet état, les individus agissent automatiquement sans contrôle conscient sur leurs actions.
Cette expérience optimale est intrinsèquement gratifiante. Le truc, c’est que cette une expérience optimale devient en elle-même une récompense ce qui pousse les apprenants à répliquer les expériences de Flow.
Elle se déclenche dans des conditions particulières : quand il y a un équilibre entre les demandes cognitives de la tâche et les compétences ce qui génère de la concentration, de l’intérêt ou de l’amusement. Souvent on me dit, c’est de la concentration ? Pas tout à fait
C’est un état de conscience altérée qui arrive quand il y a un équilibre entre compétences et demandes cognitives de la tâche / une activité cohérente, sans demande contradictoire avec feedbacks clairs et un objectif clair pour la tâche.
Ex : Je suis concentrée sur ma feuille d’impôt pour ne pas me tromper mais rarement en flow, c’est très particulier comme état…Je surveille mes enfants au parc, je ne suis pas en flow
Le flow se traduit donc par un état de conscience :
•un sentiment fort de contrôle
•un niveau élevé de concentration sur la tâche
•une absence de préoccupation du soi
•une absence de distraction
•une altération de la perception du temps
•une expérience de bien-être
C’est un état décrit par les gens qui jouent aux jeux vidéo ( c’est pour ça que ça m’intéresse) mais c’est un état qui a été énormément étudié dans le sport comme un état optimal sous jacent à un pic de performance.
ça se mesure classiquement avec des questionnaires, des entretiens - carnet mais aussi des mesures par observation (très peu) ou physiologiques (discutables en termes de qualité de la mesure). C’est souvent positif d’expérimenter du flow mais il existe aussi un coté plus obscur
à ce dernier et c’est ce que tente d’évaluer cet article : The Dark Side of Flow: A Qualitative Study of Dependence in Big Wave Surfing. https://core.ac.uk/download/pdf/4148424.pdf
Pour Csikszentmihalyi (2002), le flow peut avoir des propriétés « additictives ». Attention, ce n’est pas une « drogue » mais c’est lié à des comportements compulsifs et problématiques, y a encore des choses à creuser sur ça, bcp… je t’ai vu sourir en écrivant ça @BrunoROCHERR
Donc, dans le domaine du sport, ça pousse à prendre en compte que le flow peut être associé à un pic de performance et aussi à des effets moins positifs comme une forme de dépendance aux pratique sportives . Comme les auteurs l’indiquent, le flow n'est pas à pointer comme
une cause de comportements problématiques car c’est une composante de la motivation humaine elle-même conduite par d’autres facteurs sous jacents, on ne va pas tenter de réduire le flow (ça n’a pas de sens). La dépendance au sport peut être positive car elle améliore notre état
psychologique et physique mais elle peut devenir envahissante à cause de certains inconvénients comme l’anxiété lors d’un arrêt forcé ou le temps consacré au détriment d’autres activités. En plus, il faut bien distinguer les passionnés de ceux qui persistent dans
certaines activités sans prendre conscience des conséquences nocives de ces comportements sur leur vie quotidienne. Les auteurs ont donc cherché un sport où on peut expérimenter du Flow et les sports à risques comme le surf de grosse vagues sont de bons candidats.
Chez les surfeurs de grosse vagues, cette dépendance peut avoir des effets négatifs à cause du caractère dangereux de l’activité. Il y a eu plusieurs décès lors de cette pratique. Cette étude qualitative se focalise sur un groupe de surfeur pro de grosses vagues pour examiner
les effets positifs ou négatifs des expériences de Flow. Donc, 15 surfeurs pro (oui, c’est pas énorme) ont été interrogés via des entretiens semi structurées qui abordent l’expérience de Flow, de dépendance, la perception des risques , les raisons de l’engagement initial
et la persévération dans le surf et la transition entre petites vagues et grosses vagues. Ces entretiens ont ensuite été analysés avec une grille de catégorisation et avec plusieurs investigateurs. Donc, on retrouve bien les antécédents et les caractéristiques du flow chez eux.
Les surfeurs parlent plus des expériences de flow que des récompenses financières. Ils apprécient ce sentiment de flow et ils rapportent des bénéfices positifs de cet état sur leur humeur et leurs performances. Ils avancent également se sentir dépendant d’une sensation optimale
et des expériences qu’ils ont eu en surfant. Il indique aussi une forme de réalisation personnelle qui n’est pas conditionnée par l’accès à des récompenses financières mais par des sentiments euphoriques, de l’accomplissement et un besoin de surfer mieux et plus gros.
Ces derniers éléments laissent penser les auteurs à une forme de dépendance chez certains. Certains de ces surfeurs indiquent avoir besoin de plus de vitesse et de taille de vagues plus élevées pour ressentir à nouveau le sentiment de plaisir
qu’ils ont eu en surfant au préalable. Pour les auteurs, il s’agirait du dark side of the flow car il mène à des usages problématiques du surf plaçant l’activité avant la famille , le travail, certains événements sociaux ou la santé.
Pour les auteurs, la méthodologie ne permet pas de rendre compte d’un lien causal entre le flow et la dépendance aux activités physiques mais elle permet de lier certaines caractéristiques du flow comme la balance compétence / challenge à des usages problématiques du surf.
Qu’est ce que j’en pense sur le fond et pourquoi j’aime bien cet article en dépit du coté qualitatif ? Il parle du dark side of the flow, c’est un élément de réflexion intéressant. Ici, on ne dit pas que le flow est mauvais en soi mais qu’il existe une forme de perte de contrôle
chez les individus qui éprouvent cet état, les amenant à avoir une forme de compulsion pouvant être un signe de coping dysfonctionnel. Ici, les auteurs prennent beaucoup de précautions car il est très possible que le flow ne soit qu’un facteur parmi d’autres
(psychologiques, familiaux, socio économique…) qui explique ces comportements problématiques et la prise de risques chez les individus. Il est néanmoins intéressant de comprendre comment un mécanisme comme le flow qui peut être positif dans beaucoup de situation
et peut avoir son dark side. c'est aussi intéressant de lier ce concept aux comportements problématiques. L'autre aspect intéressant, c’est comprendre exactement les mécanismes cognitifs impliqués dans le flow car ça reste bien flou, l’attention, l’inhibition préfrontral …
Bref, on ne sait pas tout , on n’en voit juste le résultat.. Voilà c’est tout, je vous laisse avec la planche c’est dans le thème ! et merci !
You can follow @Sev_Erhel.
Tip: mention @twtextapp on a Twitter thread with the keyword “unroll” to get a link to it.

Latest Threads Unrolled: