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[Thread] Introduction au féminisme anticarcéral : en quoi le système pénal n’est pas efficace en matière de lutte contre les violences sexistes et sexuelles ? et quelles solutions – autres que la prison – existent pour lutter contre ces violences ?
Féminisme carcéral = féminisme qui revendique un durcissement des peines de prison en matière de violences sexistes et sexuelles (féminicides, viols, agressions sexuelles, etc.)
Le féminisme anticarcéral s’oppose à ces revendications et va prôner une convergence des luttes féministes avec celles de l’abolitionnisme pénal
Ici on va surtout causer de pourquoi être pour l’abolition du système pénal est compatible avec la lutte contre les violences sexuelles + évoquer des alternatives pour rendre justice aux victimes de violences sexuelles d’un point de vue féministe anticarcéral
Déjà, quelques rappels sur les inégalités présentes dans le système de justice pénale
On le dit sans cesse, les victimes de violences sexistes et sexuelles ne sont pas correctement reçues lorsqu’elles entament des poursuites judiciaires contre leur agresseur
Le système pénal n’est pas formé, n’est pas conçu, pour gérer ce genre de cas
Le système pénal n’est pas formé, n’est pas conçu, pour gérer ce genre de cas
En France on estime que sur 10 femmes victimes de viol, seule une déposera plainte. Et sur 10 plaintes pour viol, seule une aboutira à une condamnation
La réalité est la suivante : en France les pédocriminels, les violeurs, les agresseurs sexuels ne sont pas condamnés. Encore moins en prison
Mettre en avant les revendications pour une augmentation des peines quand ils ne vont même pas se retrouver face à un tribunal est déjà questionnable
Autre réalité : le profil des agresseurs condamnés
Les rares agresseurs condamnés sont en écrasante majorité issus de la classe populaire et/ou non-blancs.
Les rares agresseurs condamnés sont en écrasante majorité issus de la classe populaire et/ou non-blancs.
Le féminisme est régulièrement instrumentalisé pour alimenter le racisme d’Etat ; cela permet d'ignorer le problème tout en incriminant les populations immigrées
Les violences sexistes et sexuelles ne sont alors plus un problème de misogynie – présent dans toutes les sphères de la société – mais un problème racial et de classe ( https://lmsi.net/Geographie-du-sexisme)
Le système pénal est empreint de racisme et de classisme. Les hommes blancs, bourgeois, peuvent tuer, violer, agresser les femmes en toute impunité
On trouve la pédocriminalité inacceptable en principe, mais en pratique on la relativise quand l’accusé est une personnalité publique puissante et appréciée
On l’a vu récemment avec les affaires Polanski ou Matzneff par exemple
On l’a vu récemment avec les affaires Polanski ou Matzneff par exemple
De plus, il convient d’interroger l’objectif de la prison : si c’est d’empêcher la récidive, on peut facilement affirmer que la prison est un échec cuisant
Comme dit plus haut, la majorité des agresseurs ne sont pas condamnés, encore moins condamnés à de la prison ferme
Comme dit plus haut, la majorité des agresseurs ne sont pas condamnés, encore moins condamnés à de la prison ferme
Il est impossible de calculer réellement le taux de récidive en ce qui concerne les violences sexuelles, mais on sait que l’emprisonnement de manière générale a plutôt tendance à augmenter la récidive ( https://oip.org/en-bref/la-prison-permet-elle-de-prevenir-la-recidive/)
On entend beaucoup que des peines longues seraient plus dissuasives : cependant ce ne serait pas efficace pour les crimes sexistes et sexuels, car ce type de délit/crime ne résulte pas d’un choix rationnel
(plus de détails ici, à 6:58 http://sortirducapitalisme.fr/sortirdupatriarcapitalisme/308-pour-un-feminisme-anti-carceral)
(plus de détails ici, à 6:58 http://sortirducapitalisme.fr/sortirdupatriarcapitalisme/308-pour-un-feminisme-anti-carceral)
Au-delà des failles de la prison, le système pénal tout entier défavorise les femmes victimes de violences de genre.
On peut constater la défaillance du système avec les femmes de policiers victimes de violences conjugales, qui dénoncent les difficultés à les poursuivre en justice https://www.liberation.fr/france/2020/01/31/violences-conjugales-par-des-policiers-et-gendarmes-il-y-a-une-sorte-de-sacralisation-de-la-parole-d_1776563
Les difficultés sont décuplées quand les personnes menant l’enquête sont des collègues de l’auteur des violences ; même s'il y a de toute façon une tendance générale à croire le policier plutôt que sa femme
Dans un système patriarcal, les violences sexuelles sont avant tout une affaire de pouvoir
Les hommes violent les femmes parce qu’ils le peuvent, pour affirmer leur domination
Les hommes violent les femmes parce qu’ils le peuvent, pour affirmer leur domination
En attendant d’abolir durablement la domination masculine, une solution est d’extraire les femmes de la situation avant que les violences commencent ou s’aggravent, par exemple en leur proposant une place dans un centre d’hébergement spécialisé
Dans cet article, les témoignages des femmes sont assez révélateurs ; une dit justement « la police n'est pas là pour aider les victimes, elle est censée arrêter les délinquants. » https://www.aurore.asso.fr/pole-urgence-sociale-et-hebergement/les-femmes-victimes-de-violences-accueillies-a-aurore-temoignent-pour-aider-dautres-femmes
Axer les revendications féministes sur le financement de ce type de centre d’hébergement (bien que ce soit critiquable) est une première alternative aux revendications d’allongement de peines de prison
Mais on est d’accord, il faut tout de même faire quelque chose avec les auteurs de violence
Pour cela, on a deux modèles de justice autres que la justice pénale : la justice restaurative et la justice transformatrice
Pour cela, on a deux modèles de justice autres que la justice pénale : la justice restaurative et la justice transformatrice
La justice restaurative est déjà mise en place dans plusieurs pays dont la France. Elle consiste, en très résumé, à faire dialoguer la victime et l’auteur dans le but de réparer les répercussions de l’acte commis http://www.justice.gouv.fr/le-ministere-de-la-justice-10017/quest-ce-que-la-justice-restaurative-29943.html
La justice transformatrice va elle reprendre les principes de la justice restaurative mais se veut complètement indépendante du système pénal
De plus, dans l’idée d’une justice transformatrice, il doit y avoir en parallèle tout un travail pour agir sur les causes qui ont rendu possible les actes tels que les violences sexuelles
(plus de détails et mieux expliqué ici à 42:06 http://sortirducapitalisme.fr/sortirdupatriarcapitalisme/308-pour-un-feminisme-anti-carceral)
(plus de détails et mieux expliqué ici à 42:06 http://sortirducapitalisme.fr/sortirdupatriarcapitalisme/308-pour-un-feminisme-anti-carceral)
En gros, on arrête de considérer les violences sexuelles comme un problème individuel, et on les traite plutôt comme un problème social
Pour conclure ce thread déjà beaucoup trop long, il semble important de souligner que le féminisme anticarcéral n’a pas pour but de dicter aux victimes quel comportement elles doivent adopter
Si une victime souhaite déposer plainte, peu importe ses raisons, elle doit pouvoir le faire dans les meilleures conditions possibles
L’abolitionnisme du système pénal est régulièrement instrumentalisé (notamment dans les milieux militants de gauche) pour dissuader des victimes de déposer plainte ; c’est absolument inacceptable, en plus d’être à côté de la plaque
Ces critiques, réflexions et propositions d’alternatives ne signifient pas qu’on ne doit pas rechercher une justice punitive dans un système qui ne prône que cela
Il y aurait encore mille choses à dire, comme par exemple parler du cas des femmes emprisonnées, ou des femmes proches de prisonniers et de l’augmentation de leur charge matérielle et émotionnelle
Mais aussi mentionner le fait que mettre réellement tous les agresseurs sexuels en prison est impossible étant donné le nombre que ça représenterait
Ou on pourrait discuter des questions éthiques que pose le rôle punitif de la prison
Ou on pourrait discuter des questions éthiques que pose le rôle punitif de la prison
Bref, être féministe et anticarcérale c’est possible
C’est même carrément logique quand on dit vouloir défendre toutes les femmes
C’est même carrément logique quand on dit vouloir défendre toutes les femmes
