Alors que je discute avec une copine en couple hétérosexuel, je ne m’étais pas rendue compte à quelle point le discours « les femmes sont chiantes et prises de tête » est une stratégie de défense masculine permettant de ne pas faire de travail émotionnel
« sois plus chill » « sur moi ça glisse » « tu te poses trop de questions » :
Les mecs ne se posent pas assez de question et se décharge complètement sur leur partenaire femme, et en plus trouvent qu’elles exagèrent.
Et se disent que ça ira mieux demain.
(Spoil : ca n’ira pas mieux demain)
(Et se plaignent qu’on veuillent trouver des solutions aux problèmes parce que eux, ça va en fait)
Refuser de se poser des questions ou de se prendre la tête : privilège masculin
Parce qu’en attendant, on encaisse, on réfléchit, on propose, on gère les émotions de l’autre, on gère le déni de l’autre.
Nos amitiés féminines sont indispensables à notre équilibre psychique lorsque nous sommes en couple hétérosexuel
Sinon à qui parler ? Avec qui avancer sur nos couples ? Où faire ce travail émotionnel si notre conjoint refuse ?
Refuse/trouve que t’exagères /que tu te prends trop la tête/ que t’as des exigences trop hautes / que ça ira mieux quand tu iras mieux / qu’il en a
marre des nouvelles règles / qu’il voit pas le problème et que la situation lui convient / qu’il est fatigué de sa journée / que t’es toujours sur son dos/ qu’il préfère changer de sujet / qu’ il te parle de ce truc d’il y a 6 mois pour se défendre (et pas parler du pb que tu
soulèves) / que c’est pas si grave / que c’est toi qui manque de confiance dans la relation / qu’il fait des efforts mais que tu vois rien / que oui il va prendre rdv chez le psy de couple mais qu’il voit pas l’intérêt / que oui il va le faire, arrête de l’infantiliser/ qu’il
est un procrastinateur mais tu le savais en te mettant avec lui / qu’il fait déjà des efforts en dehors du couple (et à l’intérieur ? Comment ça ça suffit pas ?) / que tu crois que vous allez mal, mais c’est toi qui va mal / qu’il n’a pas la force pour faire ce travail émotionnel
Honnêtement, je crois avoir mille fois plus discuté avec chacune de mes amies de mes pb de couple qu’avec mon ex.
J’aurai préféré parler avec lui de ma décision de le quitter. Je l’ai fait. Une fois. J’ai ébranlé sa confiance en notre couple, plus aucune discussion possible.
« Oui t’as l’air un peu en colère ludi, non ? »
Oui. Depuis des mois. Et je découvre à quel point ça me permet d’en parler (surtout aux femmes de mon univers). Et en parler me permet de voir à quel point mes pb de couples étaient systémiques, et non individuels.
A l’avenir, je parlerai plus de mes problèmes de couples. Y compris à ma psy à qui je n’ai quasi jamais parlé de mon couple.
Parce qu’au fond, c’était moi le problème. J’avais honte de pas réussir à gérer mon couple et d’être un boulet pour lui.
Ça c’est le 2eme effet pervers du « sois chill » : en illegitimant nos demande de travail émotionnel, on ose pas en parler aux autres. Parce qu’il a certainement raison.
Cette stratégie masculine d’évitement du travail émotionnel nous isole. Et nous empêche de produire du savoir
« Ah ouais toi aussi il fait ça ? Mais on est d’accord que c’est pas normal ou c’est moi qui suis folle ? »
(Je vous parlerez bien de la diminution de l’agentivité des femmes en couple hétérosexuel, et de l’importance de réussir nos couples et notre amour dans nos identités de femmes, mais c’est l’heure du goûter)
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