Dans certains de ses écrits corsaires – des articles parus dans le Corriere della Siera – Pasolini traite par endroits du fascisme et de l& #39;antifascisme des années 70, dans l& #39;Italie des années de plomb.
Les Lettres luthériennes sont aussi l& #39;occasion de lire quelques lignes à ce propos, avec notamment une phrase qui sert souvent à formuler une critique radicale de l& #39;antifascisme contemporain.
Cette citations c& #39;est :« Le fascisme peut revenir sur scène à condition qu& #39;il s& #39;appelle anti-fascisme ». Elle est limpide n& #39;est-ce pas ? Et bien pas tout à fait à vrai dire.
Par anti-fascisme, ce qu& #39;entend Pasolini ce n& #39;est pas tout à fait les acabistes de twitter, mais l& #39;antifascisme archéologique, qui combat un fascisme lui-même archéologique pour détourner les regard du capital.
Fascisme, archéologie ? Qu& #39;est-ce à dire ? Nul besoin d& #39;aller courir les traces du Fascismosorus Rex, le fascisme archéologique c& #39;est celui qui a cessé existé en tant que force politique et ne reviendra pas (on pourrait débattre de cette assertion, certes).
Pour être très clair, c& #39;est l& #39;Italie mussolinienne, ses faisceaux de combat, son totalitarisme et son culte de la personnalité; il serait trop fastidieux d& #39;en faire le portrait-robot ici-même.
Quand Pasolini écrit: "Le fascisme peut revenir sur scène à condition qu& #39;il s& #39;appelle anti-fascisme", il ne dit pas, comme on peut le lire sur twitter par exemple, que les antifas ont des méthodes fascistes et que, de facto, ils son fascistes. Ce qu& #39;il dit est plus grave encore:
"Il existe aujourd’hui une forme d’antifascisme archéologique qui est en somme un bon prétexte pour se décerner un brevet d’antifascisme réel. Il s’agit d’un antifascisme facile, qui a pour objet et objectif un fascisme archaïque qui n’existe plus et qui n’existera plus jamais.
[...] Voilà pourquoi une bonne partie de l’antifascisme d’aujourd’hui ou, du moins, de ce que l’on appelle antifascisme, est soit naïf et stupide, soit prétextuel et de mauvaise foi ;
en effet, elle combat, ou fait semblant de combattre, un phénomène mort et enterré, archéologique, qui ne peut plus faire peur à personne. C’est, en somme, un antifascisme de tout confort et de tout repos".
Pier Paolo Pasolini, Écrits corsaires (1976)
Pier Paolo Pasolini, Écrits corsaires (1976)
En menant le combat contre rien - à la façon d& #39;un Don Quichotte ferraillant contre des moulins à vent - cet antifascisme fait un bruit assourdissant et masque celui d& #39;un autre fascisme plus sourd (au sens de manifestation larvée).
Hier on a eu droit à cette superbe saillie de Léo Lefrançois, je la réutilise car c& #39;est littéralement un cas d& #39;école de ce qu& #39;il ne faut pas écrire si l& #39;ont veut être pris au sérieux:
Qui sont les fameux fachos qu& #39;il faudrait taper ? On se rend bien vite compte que le facho, c& #39;est celui qui pense mal (pas comme moi en somme), fût-il un nostalgique du régime mussolinien ( un authentique fasciste donc)
ou un honnête homme amusé par les histoire de non-binarité et qui l& #39;exprimerait sur les réseaux sociaux. Vote-t-il à gauche ? Facho quand-même. On voit bien le peu de sérieux qu& #39;offre cette grille de lecture.
Si Pasolini se plaignait dans les années 70 que l& #39;anti-fascisme s& #39;attaque donc à un fascisme disparu, on peut en 2020 constater que l& #39;anti-fascisme de certains s& #39;en prend à un fascisme qui n& #39;existe pas et n& #39;a jamais existé.
En élargissant jusqu& #39;à l& #39;éclatement le spectre de compréhension de ce dernier. C& #39;est en fait le meilleur moyen de rendre ce concept si vague qu& #39;on soit incapables de le discerner lorsqu& #39;il pointe - ou non - le bout de son nez.
In fine, l& #39;antifascisme bon teint est le meilleur allié du fascisme qu& #39;il ne dénonce pas, celui que Pasolini assimile à la société de consommation.
On dira plus simplement le capitalisme, le libéralise-libertaire où "le totalitarisme de la consommation est pire que celui du vieux pouvoir":
Car la force de cette "société de consommation" est d& #39;avoir modifié en profondeur les cultures du monde et de les avoir fondues dans une acculturation absolue, aberrante. Et celle-ci avait besoin d& #39;écarter toute opposition par l& #39;anathème, le refus de la critique,