Pourquoi Macron a-t-il viré Edouard Philippe pour le remplacer par Jean #Castex ? Alors qu'il n'y a pas de vrai clivage politique entre eux, qu'il est populaire et qu'il a géré avec les honneurs une crise historique ?
D'abord il y a un précédent : en 1991, soit 3 ans après son élection, Mitterrand "vire" son premier ministre, Michel Rocard, sans aucun motif politique et alors qu'ils sont tous les deux au sommet de leur popularité. On sort alors de la première guerre du Golfe.
Entre les deux, la détestation est légendaire. Mais paradoxalement, le tandem fonctionne fonctionne plutôt bien. On le sait peu, mais les deux hommes partagent les mêmes communicants : le duo Colé-Pilhan.
Lorsque Mitterrand décide de "virer" Rocard, le duo Colé-Pilhan éclate. Pressentant le désastre, Colé refuse de suivre. En désaccord avec le "Prince", il quitte l'Elysée. L'histoire lui donne raison : l'opinion ne comprend pas, et Mitterrand perd 30 points en quelques semaines.
A l’époque, Mitterrand essaie de donner du sens à la nomination de la remplaçante de Rocard en choisissant, précisément, une femme : Edith Cresson qui demeure, 30 ans après, la seule femme premier ministre française.
Le sens est double puisqu’Edith Cresson est aussi celle qui, quelques mois auparavant, a claqué la porte de ce « gouvernement de merde ». C’est donc un choix très humiliant pour Michel Rocard.
Le choix de Jean Castex présente comme point commun avec celui d’Edith Cresson de ne pas être un choix de nature politique. Un homme de droite succède à un homme de droite. C’est un choix personnel du Président.
Le choix de Jean Castex entérine une ligne politique qui n’est pas une surprise. LREM se fracture au parlement sur l’axe droite-gauche, les écolos conquièrent en centre-ville les anciens électeurs de la gauche de LREM, qui s’allie souvent localement avec la droite.
Cette lecture est tempérée par l’annonce, concomitantte, d’un directeur de cabinet plutôt classé à gauche. Cette médiatisation est autant un souvenir du « en même temps » des débuts qu’un rappel public que l’autorité viendra de l’Elysee.
Si l’habitude de « domestiquer » les ministres en leur imposant des dircabs à la solde de l’Elysee est aussi vieille de la cinquième République, leur médiatisation est, en revanche, très rare. Castex appréciera l’attention.
Le positionnement à droite de Jean Castex sera aussi tempéré par des « prises » venues de la société civile ou de la gauche, s’il s’en trouve pour tenter l’aventure. Et il s’en trouve toujours, même si c’est plus compliqué en fin de mandat.
Si le choix de Castex n’est pas de nature politique, il est donc un choix de convenance personnelle du Président. Ce qui pose plusieurs problèmes.
Virer un premier ministre populaire en plein milieu d’une crise historique est un choix périlleux. Parce qu’à l’incompréhension s’ajoute l’inquiétude. L’absence de notoriété de Jean Castex n’est pas un problème en soi. C’est un problème parce que l’inconnu n’est pas rassurant.
Autrement dit, à une période où l’anxiété est maximale, où le sentiment de ne pas maîtriser son destin domine les esprits, on enlève un pilier réconfortant, qui a fait ses preuves - meme si ce sera débattu en justice - pour lui substituer l’inconnu.
Et le tout sans avancer de raison valable, en dehors d’une campagne électorale présidentielle, qui n’est par précisément une priorité pour les Français en ce moment. Si on avait présenté un « virage ecolo » ou social avec une figure l’incarnant, la donne aurait été différente.
La recherche des médias d’« une femme » candidate était précisément ça : une quête de sens dans un cadre qui n’en a déjà pas beaucoup.
Alors pourquoi Castex ? Parce que la vraie et seule menace sérieuse identifiée par l’Elysee pour 2022 vient de la droite. Et pas n’importe quelle droite, une droite sociale, gaulliste, incarnée dans des territoires. Soit plus ou moins, le profil de Bertrand, Baroin voire Pecresse
Quand Castex dit au 20h de TF1 « je suis un gaulliste social », ce n’est absolument pas un hasard. Il balise précisement le territoire sur lequel le Président se sent menacé pour 2022.
Le choix fait par Macron est-il le bon ? On devrait être fixés très vite. Et cela dépend aussi du casting. Macron semble avoir eu beaucoup de facilité pour se séparer de son premier ministre. Saura-t-il faire le « ménage » dans « son » gouvernement ? Grande question.
You can follow @moreauchevrolet.
Tip: mention @twtextapp on a Twitter thread with the keyword “unroll” to get a link to it.

Latest Threads Unrolled: