Ce qui me frappe avec les droitards, plus récemment encore avec Mélenchon, c’est leur incompréhension totale du concept de privilège.
Beaucoup de gens, par intérêt ou par ignorance, déforment notre analyse du privilège.

Qu’est-ce que le privilège tel que nous l’entendons ? 1/27

C’est un effet de système. J’insiste. Ca veut dire que l’intention de l’individu n’est pas une variable pertinente.
Un bourgeois plein de bons sentiments envers les classes populaires reste un bourgeois. Il continue à profiter de ses privilèges de bourgeois. 2/27

Il y a plusieurs formes d’oppression.

Comment définir l’oppression ?
Toutes choses égales par ailleurs, vaut-il mieux être
:
- riche ou pauvre ?
- un homme ou une femme ?
- cisgenre ou transgenre ?
- blanc-he ou racisé-e ?
- hétéro ou homo ?
- valide ou handicapé-e ?
- etc. 3/27

Quelles sont les variables qui changeraient ?
A niveau égal de richesse, un homme blanc cisgenre hétérosexuel vit-il la même vie qu’une femme transgenre racisée homosexuelle ?
Subit-on la même violence ? 4/27

Les oppressions diffèrent de nature, et non de degré.
Les. Oppressions. Ne. S’additionnent. Pas.
Ca n’a aucun sens. Ca ne se calcule pas. Nos vies diffèrent qualitativement et non quantitativement.
Ce n’est pas le concours du plus oppressé. Ca n’aurait aucun sens. 5/27

Au contraire, c’est souligner que les oppressions diffèrent qualitativement les unes des autres. Qu’elles ne sont pas comparables. Les violences oppressives diffèrent qualitativement les unes des autres. 6/27

[viol/racisme]

Ca n’est pas la même chose d’essuyer les refus des employeurs à cause de votre handicap, de subir un viol car vous êtes une femme transgenre racisée, d’avoir perdu son emploi précaire, d’avoir subi des cris racistes sur un prestigieux terrain de football. 7/27

Personne de sensé n’a dit, jamais, qu’un Noir riche était plus opprimé qu’un Blanc pauvre. Des gens l’ont dit ? C’est qu’ils n’ont rien compris.

Ca n’a aucune pertinence. Chacun-e vit des oppressions qui diffèrent qualitativement, qui sont incomparables. 8/27

Ca n’a rien à voir d’être condamné à la précarité ouvrière et de subir des actes racistes sur un terrain de football. Et personne ne cherche à savoir qui est la personne la plus privilégiée. Ca n’est pas comme ça qu’il faut raisonner. 9/27

L’intersectionnalité consiste à souligner qu’il existe simultanément plusieurs formes de stratification, domination ou de discrimination dans une société. Le tout est de les identifier. 10/27

On remarque que toutes choses égales par ailleurs, 85 % des adultes autistes avec un diplôme universitaire sont au chômage.
Cela signifie que si on fait changer une seule variable (ici, la variable validité/handicap), la vie d’une personne peut différer radicalement. 11/27

La vie d’un riche homme blanc cis hétéro autiste sera radicalement différente de celle d’un riche homme blanc cis hétéro neurotypique.
Ca ne signifie pas que la classe sociale, par exemple, ne joue pas un rôle primordial dans la vie de quelqu’un. 12/27

Evidemment qu’un homme blanc cishet pauvre et autiste vit une vie radicalement différente de l’homme cishet riche et autiste.
La première étude sur l’autisme, publiée en 1943, a vu la grande majorité de ses enquêté-e-s finir dans des institutions psychiatriques. 13/27

En revanche, le plus économiquement favorisé, Donald Triplett, a pu mener une vie à peu près autonome, obtenir un diplôme universitaire, voyager. Il a bénéficié des privilèges qu’il a de par sa classe sociale, et mené une vie radicalement différente, 14/27

vécu des violences radicalement différentes, de celles qu’ont vécu les hommes blancs cishet autistes pauvres. Ces derniers ont fini institutionnalisés à vie.
C’est radicalement différent. 15/27

Pour autant, la vie de Donald Triplett est-elle proche de celle que vit un riche blanc cishet neurotypique ? Non. Absolument pas.
Il y a plusieurs variables dont il faut tenir compte. Ces variables sont qualitatives : elles ne s’additionnent pas les unes aux autres. 16/27

Telles ou telles discriminations ne se comptent pas en points d’oppression que l’on additionne.
L’idée de l’intersectionnalité, c’est de reconnaître cette différence qualitative entre les terrains de domination.
Le genre en est un, la race en est un, la classe en est un. 17/27

Tous les facteurs sont entremêlés, influent les uns sur les autres. C’est ce qui rend si complexe toute tentative d’analyse sociologique. L’objet est gigantesque. 18/27

Les différentes catégories de genre, de race, de classe, etc. (toutes les citer serait trop long…) ont été créées parce qu’il semblait qu’il y avait certaines caractéristiques des êtres humains avaient des conséquences sociales décisives. 19/27

Que toutes choses égales par ailleurs, être un homme cis blanc pauvre et une femme cis blanche pauvre diffèrent radicalement par certains aspects.
Toutes les variables sociologiquement significatives sont l’objet de terrains de domination spécifiques. 20/27

Ces terrains peuvent empiéter les uns sur les autres. Une femme transgenre a plus de chances d’être pauvre qu’un homme cis parce que la discrimination d’identité de genre mène à la discrimination de classe. 21/27

La phrase « un Noir riche est plus privilégié qu’un Blanc pauvre » n’a aucune pertinence.
Elle suppose que nous basculions du terrain de domination de la classe vers celui de la race.
Ce n’est certainement pas ce que nous disons. 22/27

Au contraire, nous prenons en compte les deux terrains de domination, en observant en quoi ils diffèrent, en quoi ils se recoupent, quelles sont leurs interactions réciproques. 23/27

Un Blanc pauvre vivra une vie différente de celle du Noir riche. Le Noir riche vivra des discriminations racistes, pas le Blanc pauvre ; le Blanc pauvre vivra des discriminations liées à sa classe, pas le Noir riche. 24/27

Les oppressions liées à la race se manifestent de façon très différente en fonction des milieux sociaux.
Le Noir riche et le Noir pauvre vivront des agressions différentes mais qui ont toutes pour racine la négrophobie. 25/27

Ce n’est pas une compétition.
C’est un appel à la révolution.
C’est un appel à la reconnaissance et à l’étude approfondie de toutes les variables qui nous différencient les un-e-s des autres pour pouvoir mieux les ajuster. 26/27

Il n’y a qu’en travaillant sur ces différentes variables simultanément que nous pourrons abolir les oppressions systémiques.

Ceux qui nous accusent de négliger la classe et nous taxent de racialistes se trompent.
La classe, oui, cent fois la classe. Mais pas que... 27/27