[THREAD] Récit d'une journée entre femmes dans la rue.

Hier, j'ai invité une dizaine de femmes d'horizons différents à venir peindre la façade du squat où j'habite dans le 12e arrondissement de Paris.

📷 @PaulineMakov
C'est Lady K, grande peintresse devant l'éternelle, qui a fait le lettrage. Elle tenait à écrire "MY BODY MY CHOICE" après avoir reçu masse de commentaires dévalorisants son apparence physique sur Instagram pour avoir posté une photo d'elle en maillot de bain.
📷 @PaulineMakov
Si la grossophobie est une violence immense, elle n'existe pas de mot pour définir les injonctions qu'on fait aux femmes minces et maigres. Les hommes ne peuvent pas s'empêcher de commenter nos corps. Nous sommes toujours soit "trop" soit "pas assez".
Cette après-midi était magnifique. Certaines pieds nus sur le goudron, d'autres perchées en haut d'une échelle, chantantes "sous mon sein la grenade" ou du Aya Nakamura, d'autres encore assises à même le trottoir, toutes concentrées joyeusement sur notre oeuvre.

📷 @PaulineMakov
Nous nous sommes payée le luxe d'une après-midi d'union dans la rue, sans qu'aucun mec à une exception près, ne vienne nous emmerder.
Si c'est importante pour les femmes de se réunir dans des espaces non mixtes pour échanger leurs expériences, FAIRE quelque chose ensemble.
Comme les collages, comme les actions FEMEN, toute action de rue collective nous fédère et fait naitre une complicité difficile à avoir autrement. Les discussions sont toute de suite plus faciles ; la sororité, évidente.
Parce que les femmes sont conditionnées depuis la petite enfance à être en concurrence les unes avec les autres, ces moments là sont précieux et permettent des échanges sains et des rencontres qui ne pourraient pas avoir lieu dans un autre type de contexte.
Expérimenter la joie que c'est d'être dans la rue pour l'habiter, pour l'investir vraiment alors que nous en sommes habituellement privées, c'est conquérir ensemble de nouveaux droits.

📷 @PaulineMakov
[TW violences masculines / viol / harcèlement de rue]

Après ça, vers 22h, nous sommes sorties à 5, coller deux grands messages qui nous tenaient à coeur.
Voici le premier :

📷 @PaulineMakov
Le collage a duré 20 minutes. Pendant tout ce temps, nous avons été interrompues par des hommes qui nous tournaient autour, lisaient le début de notre message à voix haute, et décrédibilisaient notre geste.
Au début, nous leur avons gentiment demandé de se mettre en retrait.
Comme ils n'arrêtaient pas, nous avons commencé à protester plus forte. L'un d'entre eux est devenu très virulent.
Et je ne sais pas comment le dire, mais voilà, il a affirmé fièrement en pleine rue, qu'il avait violé des femmes, et que la première était une tunisienne de 7 ans.
Il a commencé à proférer des menaces en arabe, et ne s'attendait peut-être pas à ce que l'une d'entre nous lui réponde avec véhémence dans cette langue. Ses amis s'en sont mêlés.
Voilà comment 5 femmes parties afficher leur révolte contre les viols qu'elles ont subies pour reprendre un peu de pouvoir sur leurs vies, se sont retrouvées prises d'assaut par des violeurs.
Nous avons fini par les faire partir en scandantes "Violeurs! Violeurs! Violeurs!".
Cette agression montre la nécessité de continuer à coller sur les murs de nos villes et villages. Tant que nous ne seront pas tranquilles dans la rue, tant que ces collages dérangent, ils sont utiles.

La vidéo est dispo sur le compte instagram de Pauline Makoveitchoux.
Après ça, on a voulu faire un deuxième collage reprenante des paroles de Diam's.
Le voici :
📷 @PaulineMakov
Cette fois ci, plusieurs personnes se sont encore arrêtées, des hommes et des femmes. Parce que nous avons été interrompues, ça a duré très longtemps.
Un homme nous a insultées de "putes" depuis sa fenêtre.
Une femme mécontente de nous voir coller la façade d'un bar abandonné et recouverts d'en enchevêtrement de tags, a eu ces mots : "va niquer ta grand-mère", "sale pute". Elle a menacé d'en venir aux mains, me forçante à reculer en avançante sur moi, m'effleurante même le visage.
Toute cela devant son enfante de deux ans en poussette. On s'est dit après que la petite devait probablement subir les cris et la violence à la maison, parce qu'elle n'a pas eu un geste de surprise. Une enfante élevée dans un contexte sain aurait surement fondu en larmes.
La vidéo est également disponible sur le compte Instagram de Pauline Makoveitchoux, et elle se termine au moment où la femme éclate son téléphone par terre.
Voilà, c'était un récit un peu maladroit, et factuel. Je ne suis pas sûre d'avoir su le mettre en forme correctement, mais c'était importante de raconter les violences auxquelles peuvent être confrontées des femmes qui décident de s'exprimer librement dans l'espace public.
You can follow @Margueritestern.
Tip: mention @twtextapp on a Twitter thread with the keyword “unroll” to get a link to it.

Latest Threads Unrolled: