Vous avez surement déjà entendu parlé des théories relatives à un effondrement global. Mais saviez-vous qu’un effondrement, ça peut arriver à une échelle plus réduite ?
Comment un lac peut s’effondrer :


Comment un lac peut s’effondrer :



Dans les lacs peu profonds, on a souvent beaucoup de plantes aquatiques (macrophytes dans le jargon). Ces plantes vont fournir de nombreuses cachettes pour les animaux de petites taille, en particulier ceux qui mangent le phytoplancton (les microalgues en suspension dans l’eau)
Ces macrophytes vont aussi limiter le développement du phytoplancton en faisant de l’ombre lorsqu’elles arrivent proche de la surface, mais aussi en consommant les nutriments minéraux (nitrates, phosphates) dont le phytoplancton a besoin pour se développer.
Les macrophytes vont aussi libérer dans l’eau des composés chimique qui peuvent inhiber le développement du phytoplancton (même s’il n’est pas sûr que ce phénomène soit réellement efficace).
En plus de cela, cette végétation va aussi limiter les turbulences au fond du lac, limitant la remise en suspension de sédiments.
Tous ces éléments contribuent à faire que ces lacs ont une eau très claire avec peu de phytoplancton et de particules en suspension.
Tous ces éléments contribuent à faire que ces lacs ont une eau très claire avec peu de phytoplancton et de particules en suspension.
A l’opposé on va aussi trouver des lacs avec pas ou peu de plantes aquatiques, et une eau très turbide. Ces lacs accueillent généralement une biodiversité plus réduite.
Dans ces lacs, le phytoplancton empêche la lumière d’arriver au fond et les plantes aquatiques ne peuvent pas se développer. Il n’y a donc pas d’abris pour le zooplancton qui se fait manger par ces prédateurs (poissons) avant de pouvoir réduire la densité du phytoplancton.
Les lacs clairs correspondent généralement à des lacs dans lesquels il y a de faibles apports en nitrates (N) et phosphates (P) et les lacs turbides à des lacs dans lesquels ses apports sont forts.
Une augmentation des apports en N & P (qui peut être due par exemple à la fertilisation agricole) peut entrainer une transition d’un état « clair » vers un état « turbide ». Mais cette transition ne se fait absolument pas en douceur.
Au début l’augmentation de N&P va être utilisé pas le phytoplancton pour se développer plus, mais le phytoplancton va rapidement stopper son développement et les plantes vont récupérer la plus grande part des nutriments apportés : Il n’y aura donc aucun changement visible.
Jusqu’au moment où ces différents mécanismes ne seront plus suffisant pour contrôler le phytoplancton, qui va donc rapidement pouvoir capter toute la lumière.
La végétation aquatique, privée de lumière va s’effondrer, le zooplancton, privé de l’abri qu’offrait la végétation aquatique va s’effondrer aussi.
Ainsi, en très peu de temps, l’écosystème va s’effondrer complètement, les causes sont déjà là bien avant que l’on arrive à cet effondrement, mais il n’y a pas ou peu de signaux d’alerte permettant de dire que l’écosystème va bientôt s’effondrer.
Une fois que ce basculement a eu lieu, le retour vers l’état initial est très difficile, même en supprimant les apports en N & P qui ont initialement fait basculer le système
De telles transissions brutales vers des états dégradés existe dans d’autres milieux. Certains font un parallèle avec la théorie d’un effondrement global. Je ne sais pas si un tel effondrement est possible à l’échelle globale, mais en tout cas à plus petite échelle cela existe.
Sources (qui peuvent aussi permettre d’aller plus loin) :
Scheffer et al. Alternative equilibria in shallow lakes
https://doi.org/10.1016/0169-5347(93)90254-M
Scheffer et al. Alternative equilibria in shallow lakes
https://doi.org/10.1016/0169-5347(93)90254-M
Hilt et al. Translating Regime Shifts in Shallow Lakes into Changes in Ecosystem Functions and services https://doi.org/10.1093/biosci/bix106
Scheffer et al. Anticipating critical transitions https://science.sciencemag.org/content/338/6105/344