Cette nuit, torsions du cerveau, je me suis revu au tout début de ma carrière en CI, dans le couloir jouxtant le Tribunal, attendant les délibérés avec la proc' d'audience, chacun une clope au bec, rediscutant off de l'affaire dans laquelle on venait de ferrailler sévère "on"...

Je vous parle de 1994/95, hein... Croyez-moi, on se tuait bien à l'audience, ça fusait de partout ; mais ça n’empêchait pas le respect mutuel - et en CI par exemple il n'était pas rare qu'on aille dîner ensuite, en refaisant plus ou moins intelligemment le monde judiciaire...

Je ne sais pas ce qui a fait que petit à petit c'est devenu inconcevable, que l'audience est devenue plus neutre, les débats moins âpres, les rapports humains inexistants, même quand courtois, entre les désormais "deux camps" ; les lois étaient plus simples, bon ; le "off" était

une valeur absolue unanimement respectée, d'accord, mais ça ne suffit pas à expliquer...
La multiplication des réformes successives, les pressions toujours plus grandes sur chacun des métiers, auraient eu raison de ce qui en fait l'essence pourtant, la valeur humaine, la défense

mordicus de ce à quoi on croit ?

C'est bien possible. En tout cas l'engagement était aussi total que la sortie de l'audience intelligemment partagée, discutée - je ne me souviens d'aucune autre méfiance que celle qu'on avait face aux convictions adverses...
J'ai tout appris là.

Je sais ça fait vieux con nostalgique (alors que je ne suis pas vieux) - tant pis...
En tout cas on se nourrissait mutuellement des points de vues adverses, ça ne nous rapetissait pas je crois...
Maintenant, je me demande même si on en aurait simplement... le temps...
Allez café.