[THREAD - Deleuze - l'image temps/l'image mouvement]

Si vous avez suivi des cours de cinéma à la fac, vous avez sûrement été confronté aux théories complexes de Deleuze.
Vous vous êtes probablement arrachés les cheveux en essayant de comprendre ce que Deleuze veut dire
quand il parle d'image-temps et d'image mouvement.
Moi aussi. Mais j'ai travaillé le dossier pour vous et je viens vous expliquer ce que j'ai compris. Si jamais des philosophes plus calés que moi veulent corriger un point, le rectifier ou bien l’éclaircir, qu'ils n'hésitent pas
Je me base sur mes propres lectures et sur mes cours de L3 de cinéma et notamment sur le cours de Pascal Couté : "Philosophie du cinéma".
Donc c'est parti. Deleuze a rédigé deux ouvrages : L'Image-mouvement puis L'Image-temps. Dans l'Image mouvement, il se base sur les thèses de Bergson dans Matière et mémoire. Cet ouvrage de Bergson tend à réconcilier deux conceptions philosophiques :
l'idéalisme et le réalisme. Le réalisme c'est une théorie qui admet l'existence d'un monde extérieur à notre esprit. En gros : le monde existe et notre idée du monde existe aussi mais n'a rien à voir avec le monde.
L'idéalisme c'est une théorie qui veut que
le monde existe par les idées. Ce sont les observations des phénomènes du monde qui vont lui conférer sa réalité.
Ce sont deux thèses jugées comme extrêmes par Bergson qui considère que la métaphysique pose mal les questions.
Pour Bergson, la différence entre le corps (matériel) et l'esprit (spirituel) ne s'opère pas dans l'espace mais dans le temps. Le corps est présent et l'âme est passé.
Mais revenons en à Deleuze dans l'Image-mouvement.
Il commence par évoquer l'illusion cinématographique. Il explique que le mouvement de l'image s'articule autour de poses, ou bien "instants privilégiés". Ce sont des images remarquables, situées à équidistance les unes des autres et leur enchaînement constitue un mouvement.
Il existe des images instantanées qui sont des coupes immobiles du mouvement mais aussi des images mouvements qui sont des coupes mobiles de la durée et enfin d'autres images qui sont des images temps qui existent au delà du mouvement.
Le mouvement, c'est le changement. La matière se meut pour une raison, par exemple si un animal bouge vers de la nourriture, il va manger et donc son état change.
Deleuze va appliquer ces théories au cinéma.
Il détermine d'abord six types d'image qui entrent dans le cadre de l'image mouvement : l'image-perception, l'image-action, l'image-affection, l'image-pulsion, l'image-reflexion et l'image-relation
Je vais résumer ce que sont ces images :
l'image perception est une image qui va incurver le monde autour d'elle. On va percevoir cette image en la soustrayant au tout. On va l'extraire de l'ensemble défini qu'est le cadre de façon perceptive. Elle est moins que la chose qu'elle
représente.
Deleuze parle de dicisigne : la caméra voit ce que le personnage voit, c'est un cadre fermé, un ensemble délimité.
L'image-action : il ne s'agit plus de percevoir, mais d'agir. Le monde est incurvé par l'action. Par exemple dans Star Wars, les vaisseaux se déplacent et donc leur état change.
L'image-affection : typiquement, il s'agit d'un gros plan sur un visage. Eisenstein dans le cinéma russe a très bien compris que le spectateur s'identifie aux visages qu'il voit et donc ce genre d'image permet l'identification aux protagonistes.
L'on va montrer quelqu'un d'effrayé pour faire ressentir la peur au spectateur, une femme qui pleure pour faire ressentir la tristesse, etc.
L'image-pulsion : l'image-pulsion nous entraîne vers le bizarre, l'étrange, ce qui échappe à la raison.
Typiquement, ce genre d'image induit une réponse "sensori-motrice", un sentiment fort qui nous échappe.
L'image-réfexion : il s'agit de l'image d'une image. L'objet n'est plus filmé en tant que tel mais passe d'abord par une figure.
Par exemple, une image inversée dans un miroir.
L'image-relation : une image renvoie à une autre image dans une série. Les oiseaux sont des oiseaux parmi d'autres oiseaux dans Les Oiseaux de Hitchock, mais le lien entre ces images d'oiseaux crée une image-relation.
La somme de ces images devient une image-relation.
Voilà, et donc au-delà de tout ça, il existe encore autre chose, l'image-temps.
L'image-temps apparaît dans le cinéma moderne, elle est une image qui ne provoque plus une réponse sensori-motrice mais qui est l'expression du temps.
Le personnage ne fait plus partie de l'action, et donc n'implique plus un changement.
L'image-temps existe en elle-même, elle n'appelle pas à être modifiée, mais à être "observée" en tant qu'expression d'un état.
Le personnage et le spectateur sont amenés à l'observer en tant que telle.
Voilà, c'était mon petit résumé de ce que j'ai compris de Deleuze, bien sûr tout cela est super complexe et en occultant des parties importante, j'ai un peu tronqué les théories initiale, mais si tout ça vous intéresse, je vous conseille le site du Cinéclub de Caen
qui ne jure que par Deleuze et Bergson et qui est riche d'exemples.
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