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#Complotistes et #journalistes : un besoin de dialogue [THREAD]
Face au #conspirationnistes, les #médias décortiquent les arguments et les hypothèses fallacieuses, mais passent peut-être à côté d’un malaise social plus profond qui anime les audiences les plus défiantes
Depuis quelques semaines, deux genevoises très actives sur les réseaux sociaux avancent plusieurs théories non vérifiées autour du #Coronavirus, et alimentent la défiance envers les médias.
. @FrammeryChloe, enseignante en mathématiques auprès d’adolescents, et Ema Krusi, entrepreneuse, lient l’Organisation Mondiale de la Santé @WHO et le fondateur de Microsoft @BillGates, à la surveillance digitale, le #Coronavirus, la #vaccination forcée, et la #5G.
En deux semaines seulement, les deux genevoises ont enchainé les publications de vidéos, chacune dépassant largement le million et demi de vues cumulées sur les réseaux.
Dans un épisode des #confinautes, @UsulduFutur et @Ostpolitik ont appelé à «interpeller l’opinion» quant à la dangerosité de ces discours.
Le journal @LeTemps s’est aussi inquiété de ces propos basés sur «les anxiétés et les doutes de populations en perte de repères.» https://www.letemps.ch/suisse/complotistes-senflamment-autour-coronavirus
L’article en question a rapidement été repris par le site Egalité & Réconciliation @EetR_National, considéré d’extrême droite et antisémite par la plupart des observateurs. https://www.egaliteetreconciliation.fr/La-propagande-suisse-en-panique-Les-complotistes-s-enflamment-autour-du-coronavirus-59345.html
Dans son billet, @EetR_National qualifie @LeTemps de «propagande suisse», assimilant le média à la «franc-maçonnerie» ou au «sionisme». Les commentaires d’internautes abondent dans ce sens, sans ancrage factuel.
Sur les réseaux sociaux, les internautes qui soutiennent @FrammeryChloe et Ema Krusi sont eux-aussi nombreux à afficher une méfiance, parfois virulente, à l’égard des #médias qualifiés pour la plupart de «complices des manipulations étatiques.»
Difficile pour les journalistes de lutter, car «Les théories complotistes sont par définition irréfutables. Tous les arguments qui les contredisent sont dénoncés comme faisant partie du complot.» @clemovitch @cliquetv https://twitter.com/clemovitch/status/1260499398519410689
Mais au fond, pourquoi adhère-t-on aux théories du complot ? Pour @L_Cordonier, chercheur en sciences sociales à @Univ_Paris Diderot, il ne s’agit pas uniquement d’un processus individuel. Une des causes se trouve dans l’effet de groupe.
Plutôt que d’y voir purement de la «bêtise ou de la folie», le chercheur voit dans la démarche #complotiste une volonté d’appartenance, une envie pour certains de créer du lien social.
Frédéric Lordon du @mdiplo propose qu’au lieu que le complotisme soit «un délire sans cause», il soit «l’effet d’une population qui ne désarme pas de comprendre ce qu’il lui arrive, mais s’en voit systématiquement refuser les moyens.» https://www.monde-diplomatique.fr/53070
Démographiquement, les populations «nettement plus sensibles à la rhétorique complotiste» sont les personnes plus jeunes, et moins dimplômées. C’est ce que révèle une étude de @IfopOpinion, en partenariat avec @conspiration et la Fondation @j_jaures.
Pour Géraud Lafarge, professeur en sociologie du journalisme à @UnivNantes, l’idée d’un complot médiatique pourrait aussi provenir d’un écart social grandissant entre les journalistes de formations les plus réputées, et les milieux les plus populaires.
Une étude menée entre @UniNeuchatel et l’Université de Zurich @UZH_ch relève que le nombre de journalistes hautement qualifiés est en augmentation en Suisse. https://www.researchgate.net/publication/332867787_Journalists_in_Switzerland_Structures_and_attitudes_revisited
Cet écart social entre #journalistes et audiences plus populaires «n’est peut-être pas étranger à la défiance, certes ancienne, mais croissante envers les journalistes» , explique Géraud Lafarge. https://laviedesidees.fr/Devenir-journaliste.html
Pour Laurence Kaufman, professeure en sciences sociales spécialisée dans les médias à l’Université de Lausanne @unil, le complotisme «n’est pas un symptôme faiblesse mentale, mais la manifestation d’un fossé social qu’il s’agit de combler.»
Il s’agirait selon elle de réinstaurer «une cascade de #médiations entre la société civile et les milieux médiatiques, éducatifs, scientifiques et politiques.»
Selon @jeffjarvis, fondateur de @BuzzMachine, il faudrait également que les journalistes cessent de percevoir les complotistes comme une «masse sociale anonyme» : narrative qui renforcerait davantage la vision conspirationniste.
Puisque le #complotisme est la manifestation d’une «dépossession» démocratique, comme l’explique Frédéric Lordon, Laurence Kaufmann souligne l’importance grandissante pour les médias d’encourager le sentiment chez son audience de la repossession de cette démocratie…
…«non pas comme un système froid et anonyme qui se résume à l’élection de représentants, mais comme un registre d’expérience, notamment celui de l’échange libre et symétrique.»
Ce thread a été réalisé dans le cadre d’un cours d’information et de médias numérique à l’ @AJMunine. #covid19 #coronavirus #complot #media #suisse #journalisme
