Communiqué du Collectif Fiertés en Lutte concernant L'application FLAG!
Pourquoi c'est insuffisant et inadapté ?

Retranscription sous forme de thread pour les lecteurs d'écran en dessous.
Le 24 avril 2020, l’association FLAG! a annoncé le lancement d’une nouvelle application de « signalement pour les victimes et les témoins de violences physiques ou verbales LGBTphobes ».
L'application est financée à hauteur de 50.000 euros par Marlène Schiappa dans le cadre de son plan d'urgence destiné aux jeunes LGBT pendant le confinement.Ce projet, en apparence positif, est en réalité problématique sur de nombreux aspects.
D'abord, l'accumulation de données personnelles sans contrôle représente un véritable danger pour les libertés individuelles. L'histoire récente nous montre qu'il peut en être fait un usage dangereux pour la démocratie (on se souvient du scandale Cambridge Analytica notamment)
et que ces data viennent nourrir des algorithmes qui aggravent les inégalités, comme le montre Cathy O'Nei dans ses travaux.
Dans ce contexte, la collecte des données personnelles par une application dont nous n’avons aucune connaissance du fonctionnement technique (de son code)
et qui peut laisser filtrer des informations au travers d’un pisteur est un problème. Notre inquiétude est d'autant plus grande qu'il s'agit dans ce cas d'informations très sensibles, qui touchent à l'intime.
Qui aura accès à ces informations, où seront-elles stockées, protégées ? Quelle manipulation peut-il en être fait, et à quelles fins ? Ces questions alimentent nos craintes de dérives et d'abus.
L’accès donné à la police nous interroge particulièrement.
Pourquoi avoir recours à une application alors même qu'aujourd'hui, des policier.e.s refusent encore de prendre des plaintes de personnes agressées, ou d'en retenir le caractère LGBTIAQ+phobe ? Nous avons été témoins pas plus tard que pendant le confinement d'un cas semblable :
celui-ci a du être pris en charge par les associations à défaut d'être accepté par le commissariat auprès duquel la victime avait souhaité porter plainte. Notre méfiance à l’égard de l’institution policière est soutenue par des constats concernant les agissements de celle-ci.
En cause notamment, les violences policières à répétition : rien que pour le Mouvement des Gilets Jaunes, ce sont 860 faits de violence depuis novembre 2018, un mémorandum du Conseil de l'Europe et une demande d’enquête de la Haute-commissaire aux droits de l'homme de l’ONU.
Mais ces violences n'ont pas commencé en 2018 et continuent encore aujourd'hui en plein confinement, en particulier à l'encontre des personnes racisées comme en témoignent les combats menés par le comité @laveritepradama et les très nombreux comités de Justice et Vérité.
Ces éléments combinés à l'adhésion d'une majorité des forces de l'ordre aux thèses de l'extrême droite sont préoccupants et devraient faire réagir toutes celles et ceux qui, comme nous, accordent de l'importance aux droits et libertés.
Viennent ensuite les arguments avancés par FLAG! pour promouvoir son appli, qui nous semblent peu percutants. D’abord, concernant l'argument de la géolocalisation des agressions pour permettre un ciblage des politiques publiques :
il n’est pas besoin d’un traçage numérique généralisé pour avoir connaissance des actions à mener. Les associations LGBTIAQ+ de terrain ont une très bonne appréhension des problématiques sur leur territoire et mènent régulièrement des campagnes de soutien,
de sensibilisation et d’éducation. C'est un travail militant sur tout le territoire qui depuis toujours fait reculer l'ignorance, la violence et la pensée réactionnaire. Se concentrer sur d'hypothétiques zones décrites comme "à risque"
participe une nouvelle fois à la stigmatisation des mêmes quartiers, qui ne sont pourtant pas les seuls à connaitre des agressions LGBTIAQ+phobes: les discriminations ne se cantonnent pas à un certain nombre de lieux, elles sont partout dans notre société. Rappelons, par exemple,
que les agissements de groupes d'extrême droite responsables de nombreuses agressions ont été signalés par les associations qui travaillent sur le terrain.
En ce sens nous pensons qu'une application n’est pas une solution pour lutter contre l'appréhension des victimes à porter plainte, pour cela il faut s’en prendre aux racines du problème : la stigmatisation des personnes LGBTIAQ+ dans la société
(l'article du Progrès du 18/04/20 en est encore la preuve), la méconnaissance et la violence du système judiciaire, la manque de considération des autorités, la peur des représailles.
Pour s'attaquer à ces problèmes les associations ont besoin de moyens qui manquent aujourd'hui cruellement, et qui se sont vus restreints voire retirés ces dernières années. On peut se demander si cela n'est pas une énième façon, pour le gouvernement, de soutenir et communiquer
sur un gadget à peu de frais plutôt que d’investir réellement dans des moyens humains, d’accompagnement, de formation et de prévention ? Encore une fois la "start-up nation" communique en grande pompe sur une solution miracle au contenu hasardeux,
soit disant pour protéger notre communauté des violences qu'elle subit. Elle en oublie encore une fois les plus précaires, victimes de la fracture numérique, les personnes sans-papiers dépourvu.e.s de leurs droits, les travailleurs.e.s du sexe criminalisé.e.s.
Face à cela, nous appelons les personnes et associations LGBTQIA+ à refuser des solutions dangereuses et à se mobiliser contre les violences et pour l'avancée de nos droits.

Le CFL.
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