Parmi mes collègues, les espèces de premiers de la classe qui adhèrent à toute la petite rhétorique ‘Le #11mai c’est la rentrée’, et ajoutent ‘mOi Je sUiS hEuReUx dE REPRENDRE’ ont oublié quelques trucs :

1. On ne reprend pas puisqu’on ne s’est pas arrêtés. Ce lexique >

(rentrée, reprise), apparemment sympa et anodin est issu d’un sous-entendu : confinement des profs = vacances.
L’adopter, le relayer, c’est donc abonder dans les sens des gens qui pensent éternellement que nous ne foutons rien de notre vie.

2. Accorder notre enseignement >

physique à quelques élèves tandis que les autres se démerderont chez eux avec Pronote et nos envois, c’est profondément injuste. C’est une rupture supplémentaire de l’égalité devant le droit à l’instruction.

Il est évident que nous n’allons PAS récupérer les décrocheurs >

en classe, puisqu’ils sont TOUJOURS les premiers à profiter d’une situation où il est administrativement possible de ne pas être là, et puisque par définition leurs familles sont moins derrière eux que ne le sont les familles des élèves lambda derrière ceux-ci. >

3. Quand bien même nous passerions nos jours et nos nuits à essayer d’assurer du présentiel et du distantiel de même qualité, avec les trajets à gérer (qui habite loin de son établissement ? qui a des enfants à nourrir et faire bosser ? etc.), il est évident que chacun >

va perdre du temps, du contenu, de la rigueur d’apprentissage, du contact, en plus de ce que le confinement aura déjà fait perdre.

(Imaginons en plus le temps que va nous demander en classe le maintien de conditions sanitaires correctes !)

Donc, les collègues, c’est très bien >

de vouloir passer pour un prof dynamique et passionné à titre individuel, mais en un sens c’est l’ensemble de la profession que vous discréditez en planquant votre désir de briller derrière un apparent esprit de sacrifice.
Et, contrairement à ce que vous pouvez penser, >

vous n’aidez pas les élèves ce faisant : vous ne faites qu’accorder du crédit à des décisions dictées par le plus vil intérêt politique.

Bien à vous, chers collègues.

La Reine des Connasses.

(Je précise — pour les sceptiques quant à mon travail — qu’après 15j de cours par ‘correspondance’, j’ai pris 3h en visio chacune de mes classes chaque semaine, avec ce que ça sous-entend en hotline mail, téléphone, etc., et que seul 1 élève ne s’y est jamais joint).

Ah ! Voilà. J’ai dépassé 2 ou 300 FAV, donc les censeurs débarquent. Généralement d’ailleurs, ils ne sont pas profs, mais ce qu’ils adorent, c’est venir vous faire la morale, parce qu’ils savent mieux que vous ce qu’il faut dire, faire et penser quand on est prof. >

Je crois que ces personnes n’ont pas bien lu la façon dont je termine ce thread. Qu’est-ce qui n’est pas clair dans « LA REINE DES CONNASSES » ?
Et dans « CHERS COLLÈGUES » ? Pourquoi venir sermonner une connasse qui assume qu’elle l’est, et lui répondre >

quand on n’est pas son collègue alors qu’elle s’adresse à ses collègues ?

J’aime mes élèves moi aussi, figurez-vous, et ils me le rendent. Je viens de passer 2h en visio avec 2 classes, on a lu, écrit et ri, on a dévoré Maupassant, ou la guerre de Troie, on a été heureux. >

Ils sont inquiets, tous, à l’idée qu’une partie d’entre eux se retrouve prochainement en classe sans les autres, justement parce qu’on a recréé une classe virtuelle où ils sont TOUS présents. Je leur ai dit de ne pas angoisser, et que quoi qu’il arrive je maintiendrais >

le contact avec chacun. Non, on ne peut pas DÉCEMMENT se dire « hEuReUx » de « rEpReNdRe » quand cette ‘reprise’ () n’aura rien d’une reprise mais tout d’une rupture et d’un simulacre. J’irai accomplir mon devoir au moment où on me dira de le faire, mais la mort dans >

l’âme, car n’avoir devant moi qu’une fraction de mes classes, c’est un mal, et je m’en explique suffisamment plus haut.

Alors je vais encore faire ma connasse : les profs ? venez débattre, welcome.
Les autres ? allez vous faire foutre, gardez votre moraline, ou devenez profs.

[Remarque de Connasse]

(« Tiens, c’est amusant — depuis cette petite mise au point, les éructations moralisatrices des Je-Sais-Tout à 12 followers se sont arrêtées ! Pourvu que ça dure ! »)