Thread sur la 1ère guerre du Congo et la chute du Zaïre
Avec la fin de la guerre froide les États-Unis ont l’intention de s’implanter véritablement en Afrique, particulièrement en Afrique centrale qui était jusque-là une chasse gardée française. Avec comme meneur de jeu le maréchal Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu Wa Zabanga.
la chute de l’URSS leur permet de concentrer leurs efforts ailleurs, ils décident donc d’évincer plusieurs vieux dictateurs, pro-français , au nom de la démocratisation. Ces dictateurs avaient servi de bouclier contre le communisme en Afrique mais la donne venait de changer.
Ils soutiennent la rébellion du FPR (Front patriotique Rwandais) composée de Tutsi exilés en Uganda qui veulent renverser le pouvoir Hutu au Rwanda. En 1994 le genocide Rwandais fait entre 500k et 600k morts en 3 mois.
Le FPR, mouvement rebelle majoritairement Tutsi avec comme leader Paul Kagame, finit par remporter la guerre au détriment des forces armées rwandaises, armée gouvernementale, majoritairement Hutu et pro-Française.
Grâce à la zone humanitaire créee à l’Ouest du Rwanda par l’opération turquoise 🇫🇷 (frontière avec le Zaïre) et à la protection de celle-ci, les réfugiés Hutu fuyants les combats sont évacués au Zaïre avec la permission de Mobutu.
C’est une véritable marrée humaine qui traverse la frontière zaïroise, parmis ces réfugiés, des civils fuyants les représailles mais aussi l’armée gouvernementale se repliant avec tout son matériel militaire.
La ville de Goma qui n’avait que 300k habitants à l’époque voit alors déferler sur elle une vague de plus de 700k réfugiés hutu rwandais, 15k par heure, au total le Zaïre aurait accueilli au moins 1600000 Hutus.
Dès lors, les anciennes forces armées du Rwanda retranchées au Zaïre n’ont plus qu’un but : Retourner au Rwanda et reprendre le pouvoir. Ils recrutent parmis les réfugiés et forment.
Le nouveau régime au Rwanda est conscient du danger que représente ces réfugiés Hutus aux frontières avec le Zaïre, Paul Kagame sollicite l’intervention de la communauté internationale pour désarmer les militaires dans les camps des réfugiés.
Il exhorte aussi Mobutu à agir pour le désarmement des militaires et le retour des réfugiés au Rwanda. Mobutu, se méfiant du nouveau regime Rwandais, resta indifférent.
Pendant ce temps, Kagame recrutait déjà parmis les Tutsi réfugiés au Congo dans les années 50-60 et devenus Zaïrois, entre autre les Banyamulenge et autres petits groupes Tutsi du Nord-Kivu. Le nouveau régime Rwandais craignait que Mobutu utilise les Hutu armés contre lui.
L’agression du Zaïre était donc de plus en plus envisagée avec comme buts chasser Mobutu du pouvoir, régler la question des réfugiés rwandais et avoir une main mise sur l’Est congolais riche en minerais, pour leur compte et celui des multinationales. D’une pierre trois coups.
Néanmoins, attaquer frontalement le Zaïre à cette époque là était une très mauvaise idée pour l’image du Rwanda auprès de la communauté internationale. Ils venaient tout juste de sortir du genocide et se servaient très bien de cette tragédie pour être en état de grâce.
C’est alors que fut décidé la création d’un mouvement dont les dirigeants et têtes d’affiches seraient congolais, pour donner une certaine légitimité à l’agression et la faire passer pour une rébellion congolaise.
Yoweri Museveni le président Ugandais proposera Laurent-Desiré Kabila, un maquisard lumumbiste qui était en rébellion contre Mobutu depuis les années 60. Vivant en Tanzanie.
Le 18 octobre 1996 marqua donc la création de l’alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL)
les principaux leaders de ce mouvement étaient :

-Anselme Masasu Nindaga, Shi par son père et Tutsi par sa mère
-Laurent-Desiré Kabila dit Mzee (le vieux), un Luba du Katanga
-André kisase Ngandu, un tetela du Kasaï
-Deogratias Bugera, un Tutsi du Nord-Kivu (Masisi)
Ce mouvement avait comme soutien le Rwanda, le Burundi, l’Uganda, l’Angola et les USA/UK dans l’ombre. On nomma James Kabarebe, un officier Rwandais, comme commandant de cette rébellion.
Tout était prêt, restait plus qu’à attendre le bon moment ou une provocation pour passer à l’attaque.
Début octobre 1996, les Banyamulenge soutenus par l’armée rwandaise attaquent la ville de Lemera et massacrent des malades dans un hôpital, le vice-gouverneur du Sud-Kivu exhortera les Tutsi (Banyamulenge) de sa province de déguerpir dans un délai de 3 jours.
Voilà l’occasion que l’AFDL attendait, immédiatement ses troupes, composé à ce moment là majoritairement de Tutsi Rwandais et de Banyamulenge, se mettent en marche. La guerre ouverte a commencé.
Le 25 octobre 1996 la ville d’Uvira tombe. C’est la 1ère ville du Zaïre à tomber aux mains de la nouvelle rébellion. Le Porte-parole du mouvement s’exprime.
En conséquence, Mobutu décide le 28 octobre de nommer des militaires comme gouverneur au Nord et Sud-Kivu. Ce qui ne changea rien puisque le jour suivant Bukavu, le chef lieu du Sud-Kivu tombe à son tour, suivi de Goma le 2 novembre.
L’AFDL commence alors ses meetings dans les villes prises et débute le recrutement d’enfants soldat couramment appelés « Kadogo » (petit en swahili).
Au fur et à mesure de l’avancée l’AFDL recrutera dans les villes conquises et sera rejointe par des soldats déserteurs des FAZ (forces armées zaïroises), ce qui réduira progressivement la proportion des soldats rwandais et Tutsi.
Pendant ce temps, Mobutu souffrant d’un cancer de la prostate est en convalescence après avoir été opéré en Suisse.
Il effectue un retour triomphal à Kinshasa le 17 décembre 1996. Il rassure la population et promet d’éradiquer cette rébellion. Le général Mahele Bokungu Lieko est promu chef d’état major dans la foulée.
Mobutu recrute plusieurs mercenaires occidentaux, bosniaques etc. L’armée zaïroise concentre ses forces à Kisangani, 3ieme ville du pays, dans le but d’organiser la riposte et récupérer les villes déjà prises en partant de là.
Beaucoup d’espoir furent placés dans cette contre attaque qui tourna finalement au fiasco. Après avoir été pillée par les FAZ (Force armées zaïroises) la ville tomba le 15 Mars 1997 sans affrontements. La vérité c’est que Mobutu n’avait plus d’armée.
Mobutu tentera d’obtenir une aide militaire de la France sa vieille amie mais c’était impossible vu l’échec récent et les critiques sur l’opération turquoise au Rwanda.
Mobutu proposa alors à la France de plaider sa cause pour une intervention de l’ONU sous couvert d’action humanitaire. La France accepta mais les USA s’y opposerons. Le léopard est livré à lui-même. Il nomme Tshisekedi 1er ministre le 2 Avril 1997. 7 jours plutard il le vire.
Le 5 Avril 1997 la ville diamantifère de Mbuji-Mayi au Kasaï orientale tombe, l’état d’urgence est décrété aussitôt.
Lubumbashi est prise le 8 Avril 1997.
Ces deux villes remplissent les caisses de l’AFDL, étants de gros centres miniers. Lubumbashi devient la capitale des rebelles qui contrôlent désormais la moitié du pays.
Les villes Tshikapa (Kasaï occidentale) et Kikwit (Bandundu) sont prises par les angolais, alliés de Kabila. La ville de Kenge, aux portes de Kinshasa résiste tant bien que mal, avec le soutien de l’Unita (mouvement rebelle Angolais de Jonas Savimbi).
Les rebelles de l’AFDL sont alors contraints de passer par Mbandaka pour prendre la capitale.
C’est alors que Mobutu voudra négocier avec Kabila. Après plusieurs tergiversations, la rencontre se tient finalement le 4 Mai 1997 au large de Pointe-noire 🇨🇬 dans un bateau de guerre Sud-africain, l’Outeniqua. La médiation est faite par l’Afrique du Sud.
Mobutu demandait un cessez-le-feu, tandis que Kabila proposa au vieux dictateur moribond la démission en lui garantissant une retraite dorée, sécurité pour lui et sa famille, une garde personnelle et un secrétariat privé. Mobutu refusa.
La guerre se poursuit donc. Les rebelles sont aux portes de Kinshasa. Toute la ville retient son souffle, la tension est à son paroxysme. Tout les Mobutiste prennent la fuite. Les rebelles sont à 40km de la ville.
À l’époque Kinshasa est déjà une mégalopole de plus de 7 millions d’habitants. Le chef d’état-major Mahele Bokungu décide alors de négocier avec les rebelles les modalités de leur arrivée pour éviter un bain de sang dans la capitale, c’est le sauveur de Kinshasa.
Pour le camp Mobutu c’était une trahison et il fut abattu le 16 Mai 1997 au camp Tshatshi par les rares fidèles du maréchal encore dans la ville.
Le même jour, un peu plus tôt Mobutu avait pris la fuite avec toute sa suite et s’était réfugié à Gbadolite, dans son palais, au Nord du pays d’où il était originaire. C’était la dernière fois qu’on apercevait son cortège à Kin.
Il s’envola ensuite pour le Togo 🇹🇬 puis ensuite pour le Maroc où il mourra le 7 septembre 1997. Il y est toujours enterré d’ailleurs.
Le 17 mai 1997 dans l’après-midi la ville de Kinshasa tombe. Menées par James Kabarebe les rebelles prennent la capitale. Les Kadogo (enfants soldats) sont les 1er à rentrer dans la ville. Le pays redevient Congo. Le Zaïre c’est fini.
Une année plutard Mzee Kabila chassera ses anciens partenaires Rwandais/Ougandais/Burundais. Ceux-ci se comportaient en pays conquis dira-t -il. C’est dans ce contexte qu’éclata la deuxième guerre du Congo en 1998.
LD Kabila mourra assassiné le 16 janvier 2001 et son fils Joseph Kabila lui succédera au pouvoir.
De 1996 à aujourd’hui le Congo n’a plus jamais été pareil. L’Est du Congo n’a plus jamais eu de répit. De nombreuses milices rebelles à la solde du Rwanda/Uganda/Burundi s’y sont implantées et y exploitent les minerais pour le compte des multinationales.
Depuis, le Rwanda, soutenu activement par les anglo-saxons, a une main mise sur l’économie de cette partie du pays et soutient la plupart des milices rebelles (CNDP,M23 etc). Ce pays est entrain de se construire sur les corps sans vie des millions de congolais.
L’armée congolaise n’a pas le contrôle de plusieurs périmètres de son territoire, cet absence de l’état a occasionnée la prolifération des milices Maï-maï, des groupes d’autodéfense civils utilisants la spiritualité ancestrale.
C’est par le Rwanda que traverse le gros des minerais extrait illégalement par les milices ce qui a fait de ce pays le 1er exportateur du Coltan sans avoir des mines de coltan sur son territoire. Entre 1998-2000 ils auraient fait plus 250 millions de $ grâce au Coltan congolais.
Le Congo détient 80% des réserves mondiales de ce précieux minerais. La déstabilisation du Congo est parallèle au boum de l’électronique. On a tous un bout de Congo, un bout de minerais de sang dans nos smartphones, Playstation, Ordinateur, Voiture etc.
De 1996 à 2020, les différentes guerres au Congo ont fait plus de 6 millions de morts.
Dans ce thread j’ai essayé au max de condenser le récit, c un sujet très complexe, impliquant plusieurs personnages et plusieurs enjeux. J’ai pas abordé la situation politique qui a rongé le Zaïre de l’intérieur et favorisé sa chute, c’est un sujet qui mérite son propre thread.
J’invite donc les frères/sœurs calés sur le sujet à faire un thread la dessus. Si demande il y a, je pourrais aussi éventuellement faire un thread sur la deuxième guerre du Congo (1998).

Merci d’avoir lu. J’espère que le thread vous a plu. 🇨🇩
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