Vous connaissez cette histoire d'une speakerine française des années 60 qui s'était fait virer pour avoir montré ses genoux à l'antenne ?

L'autre jour, je me suis demandé si c'était vrai ou si c'était une légende urbaine. Devinez quoi... Ni l'un ni l'autre.

Disons que c'était la version "officielle" que la principale intéressée, Noëlle Noblecourt, a laissé courir depuis 1964 (date de son renvoi) jusqu'en... 1995.

La réalité est tout autre, ses genoux n'avaient rien à voir là-dedans. En fait, son producteur, Raymond Marcillac, lui avait fait des avances - qu'elle avait refusées.
Elle a été virée dans la même journée.

Ce qui est intéressant dans cette histoire, c'est qu'elle l'a racontée elle-même à la télévision en 1995, donc. Voici l'archive https://www.ina.fr/video/I05248720/

Cette archive est extraordinaire. Il y a TOUT. Le "droit de cuissage", le refus qu'un homme "impose" une "galanterie", le récit du dénigrement de la jeune femme (dont ses capacités pro), le terme "harcèlement sexuel"... Incroyable. 1995 !

Et je n'ai trouvé aucune mention du fait que Marcillac aurait porté plainte pour diffamation contre Noëlle Noblecourt après cette émission. Il aura eu au moins la décence de ne pas le faire.

Depuis #MeToo , je me pose une question : de la libération de la parole des femmes ou de la disparition subite de la surdité des hommes et de la société, laquelle a entraîné l'autre ? (C'est l'histoire de l'oeuf et de la poule.)

Parce que "libération de la parole", oui et non. Non, parce que beaucoup de femmes ont toujours parlé, parfois même (mais rarement) en public, la preuve avec Noëlle Noblecourt. Oui, parce que la parole publique (grâce aux réseaux sociaux) a encouragé d'autres à le faire en privé.

Dans cette archive, c'est Vincent Perrot qui parle de "harcèlement sexuel". C'est parfait pour tous ceux qui brandissent le sacro-saint argument "c'était-une-autre-époque-on-savait-pas".
Spoiler alert : si, on savait. Et d'ailleurs ça ne l'étonne pas. Tout le monde savait déjà.

Bref. J'essaye toujours de comprendre ce qui s'est passé avec #MeToo . À mon humble échelle de femme et de simple citoyenne, bien sûr, je ne suis pas sociologue. Mais cette archive est géniale. Vincent Perrot a été parfait. Noëlle Noblecourt est merveilleuse. Merci madame