[THREAD] questionnant le système de catégorisation du sport de compétition (et ses nombreuses limites)⬇️⬇️⬇️ https://twitter.com/jufouge/status/1250089035437150209
Tout d'abord, je suis désolée d'avance si c'est un peu décousu.
Ensuite, les arguments que je présente sont sourcés mais je ne prétends pas détenir tous les éléments de ce vaste sujet donc libre à vous d'ajouter des arguments (fondés plz).
J'ai abordé ce sujet dans un cours d'éthique donc mon approche peut manquer un peu de fond sur l'historique.
De +, ça fait 2 ans que j'ai bossé dessus, il y a peut-être eu des évolutions depuis et je les ignore.
Enfin, je me considère relativement woke mais il se peut que mes propos soient maladroits, je vous prie de m'en excuser et n'hésitez pas à me reprendre gentiment dans ce cas.
Commençons...
Aujourd'hui, dans les sports de compétition, il y a plusieurs catégorisations possibles en fonction de : l'âge (cadet, junior, senior...), le poids, la validité, le genre (via des facteurs biologiques mesurés en binaire : homme ou femme).
L'objectif de ces catégorisations étant de garantir une certaine "équité" pour les participant.e.s : établir des catégories d'individus présentant des caractéristiques communes pour que la diversité de la population soit représentée et non exclue. Enfin plus ou moins...
Pour rappel, le système sportif que nous connaissons a été créé par des hommes élitistes misogynes blancs (cc Coubertin) et il s'est peu émancipé de ses origines.
L'essence même du sport de compétition c'est de déterminer un vainqueur, un + fort que les autres : du pur élitisme.
Alors donc, pourquoi chercher de l'équité si le but du sport de compétition c'est de distinguer l'athlète qui domine les autres? Celleux qui ne peuvent pas rivaliser ne devraient pas avoir leur place dans la compétition (perspective élitiste)...
A l'époque, les femmes n'avaient absolument pas leur place dans les pratiques sportives réservées aux hommes. Les pratiques qui renforçaient les "qualités féminines" étaient tolérées. Mais certaines prirent goût à l'activité physique.
Les femmes sportives ne pouvaient pas rivaliser avec les H sportifs par leur rôle dans la société (ménagère) qui leur libérait peu de temps pour l'entraînement, par le contrôle esthétique du corps (pas trop musclé), par leur éducation non sportive (contrairement aux H)...
En même temps que la création de catégories féminines est le fruit de la lutte pour la reconnaissance du sport féminin, elle signe la place de "sous-catégorie" du sport masculin qui est toujours la vision moderne du sport féminin alors même que le contexte est très différent.
Pour illustration : un homme qui fait une sur-performance est un athlète incroyable, une femme qui fait une sur-performance voit sa féminité remise en cause.
Et c'est bien le problème : comment être sûr que les catégories soient bien respectées?
Cette question pose la question bien plus profonde de la distinction H/F : sur quels critères discrimine-t-on un H d'une F? Là naissent les tests de féminités : les examens gynécologiques (éthiquement à vomir) puis les tests chromosomiques.
"Pour être une vraie F, il fallait être XX. La difficulté, c’est que le monde du sport a découvert très tard ce qu’on appelle l’intersexuation. Ils se sont aperçus qu’il y avait une infinité de différenciations chromosomiques et que des F pouvaient être XY, XXY" A. Bohuon
La problématique posée par la révélation de l’existence des individus intersexués relève du fait que l’on n’est pas capable de les classer dans les catégories, et on assiste finalement aux limites d’un système basé sur une dualité de sexe et de genre.
"Les tests de féminité ne sont plus obligatoires, mais le CIO et les différentes fédérations s’autorisent le droit d’imposer des tests à des sportives dès lors qu’elles ont un morphotype un peu trop masculin ou qu’elles explosent les records" A. Bohuon
Ces tests sont aujourd'hui basés sur le taux de testostérone des individus de sorte qu'au-dessus d'un certain seuil, on ne puisse pas courir dans la sous-catégorie des F. Or, des femmes ont naturellement des taux de testostérone élevés : Dutee Chand, Caster Semenya par exemple.
"on interdit quelque chose de naturel, comme si on interdisait les trop grands au basket!" A. Bohuon.
Il est donc question de forcer les athlètes à prendre des traitements pour réduire leur production d'hormone naturelles
Le CIO aux fédérations sportives dit que la seule vérification encore d’actualité est que : « les athlètes féminines nées hommes doivent prouver que leurs taux de testostérone sont inférieurs à un certain seuil un an avant la compétition. »
bon déjà sans nouveauté c transphobe
Cette recommandation donne ainsi le critère d’admission (une sorte de nouveau test de féminité déguisé ?) à la catégorie féminine qui devient finalement implicitement la catégorie des individus « sous-testostéronés ».
Pour autant, est-ce que les hommes ayant un « déficit » (selon les moyennes) de testostérone, pourraient intégrer la catégorie féminine ? Mais surtout, est-ce que les femmes ayant une surproduction de testostérone pourraient intégrer les catégories masculines ?
Cela présuppose également que la testostérone est LE déterminant de la performance dans le sport.
En réalité oui, elle influence morphologie et masses musculaires qui sont des déterminants de la performance de certains sports. Mais ce ne sont pas les seuls déterminants.
Sachant qu’il existe une fluidité, particulièrement dans le sport élite, dans la production de testostérone naturelle entre les hommes et les femmes, ne peut-on pas envisager des catégories selon le taux de testostérone naturellement produite ?
Ce modèle permettrait de mettre fin à la question de la place des personnes trans dans le sport de compétition et permettrait de se rapprocher d’une véritable équité (si l’on considère que la testostérone est déterminante pour la performance).
Plus spécifiquement sur la place des personnes trans dans le sport : les études montrent que les différences entre cis et trans ne sont pas si significatives dans le monde du sport élite (Wagman, 2009),
et qu’il n’est pas, jusque-là, prouvé que la performance en était influencée (Harper, 2015). De plus, on peut se demander si quelqu’un serait prêt à remettre en cause son identité toute entière dans toutes les sphères de son existence « seulement » dans l’objectif
d’avoir une médaille olympique dans la catégorie des femmes. Le concept d’hybridité de l’athlète de Shogan rappelle en effet que l’athlète n’est pas seulement un athlète, ainsi les décisions qu’il prend influencent toute sa vie et ce choix est avant tout un choix privé
relatif à son identité et non à la performance. Aussi, la crainte d’être attaquées psychologiquement par le jugement social criant l’illégitimité d’une victoire sportive remportée par une femme trans provoque l’autocensure de ces femmes quant à la compétition sportive.
Autre incohérence : les F qui pourraient battre les H n'ont pas l'opportunité de le faire. #mascufragilité
Pourquoi? Parce que le système est entretenu par des vieux hommes blancs fragiles conservateurs.
Vous réalisez que l'épreuve de tir était mixte jusqu'à ce que Shan Zhang batte les H?
Ou encore que la skieuse Lindsey Vonn s'est vu refuser par la FIS sa demande à pouvoir participer à la descente H de Lake Louise?
Les disciplines/exercices dans lesquelles les caractéristiques (à priori) féminines sont des déterminants de la performance sont peu nombreuses en sport de compétition médiatisé et, bizarrement, on n'y trouve pas d'H : gymnastique rythmique, nat synchronisée...
ça va même plus loin puisque pour des pratiques où les F seraient physiologiquement meilleures, les H ont un rôle / une discipline distincts avec des exercices mettant en avant leurs qualités, pas de sous-catégorie masculine pour ces messieurs: gym artistique, patin...
Enfin, qu’il justifie les écarts de performance ou qu’il indigne tant les écarts de revenus entre H et F sont impressionnants, le côté financier prend une place importante dans les inégalités observables entre hommes et femmes dans le monde du sport.
Le fait que Serena Williams soit la seule femme du classement des sportifs les mieux payés au monde, et à la 51ème place seulement (8eEtage, 2017), montre parfaitement ce déséquilibre. Le principe d’équité dans le sens de justice sociale est-il appliqué ici ?
C’est par manque de moyens financiers dégagés pour elles, que les athlètes F, même dans le sport élite, vont parfois devoir jongler entre vie sportive, vie de famille et une vie professionnelle à côté pour assurer des revenus décents.
Les performances des sportives qui ne peuvent pas se concentrer sur leur discipline vont donc en pâtir.
PERSPECTIVES & PDV PERSO
On peut remettre en question le fait que la testostérone soit l’unique déterminante de la performance dans toute les disciplines. Si c’était le cas, nous verrions la personne possédant le taux le plus élevé de testostérone rafler toutes les médailles,
quelle que soit la discipline. Or, chaque sport requiert des aptitudes et des compétences particulières. Ainsi, le deuxième modèle se base sur une catégorisation à la manière des paralympiques où, par sport, on pourrait définir des propriétés nécessaires et pertinentes puis
catégoriser en fonction afin de rendre chaque discipline la + équitable possible. Pour rendre le système équitable et considérer les particularités biologiques de chacun.e, on va se concentrer sur les aptitudes plutôt que sur les compétences qui s’acquièrent avec l’entraînement.
Par exemple, si l’on détermine que pour être performant en gymnastique rythmique, il faut être très souple, on va catégoriser les gymnastes selon leur taux d’oestrogène (que l’on a défini comme déterminant de la souplesse).
Cette catégorisation permettrait d’ouvrir l’accès aux H dans la discipline. Ce dernier modèle est ce qui permettrait de rétablir le plus l’équité dans le sport d’après moi. Cependant, il serait fastidieux pour les fédérations de déterminer précisément les aptitudes déterminantes.
En fin de compte, cherche-t-on l’équité à tout prix ? L’équité s’oppose à un système élitiste de méritocratie en redistribuant les chances alors même que la compétition est un système élitiste qui cherche à déterminer un vainqueur.
Au final, la compétition sportive cherche-t-elle à récompenser un.e athlète http://champion.ne  sur la base de ses spécificités, ses capacités physiques hors normes, ou pour sa quantité d’entraînement ? C'est une question de valeur : équité ou élitisme.
Voilà, c'est tout pour moi, désolée c'est super long et brouillon mais y'a tellement à dire! J'espère avoir mis en lumière de nouvelles perspectives pour vous. J'ai pas abordé le racisme et le validisme parce que je suis pas assez calée mais y'a aussi énormément à dire!
J'espère que par la suite bcp + de personnes woke seront en tête des structures de politiques sportives parce que ça manque cruellement! Pour se faire, je crois en les étudiant.e.s #STAPS !💪
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