EPISODE 10 / Aujourd'hui, la théorie d'Aristote sur la monnaie et l'intérêt

Pour retrouver les épisodes précédents =>
https://twitter.com/alexiskarklins/status/1246724581068505092?s=20

Sur la monnaie, Aristote rappelle qu’elle a pour fonction de faciliter les échanges entre ceux qui produisent les différents biens.
1/
2/ Son invention est avant tout liée à la trop grande complexité pratique du troc. Mais la monnaie remplit une deuxième fonction : elle sert également d’étalon de la valeur des biens.
3/ Les biens échangés entre les hommes étant trop différents les uns des autres, la monnaie les rend comparables et commensurables. Malheureusement, selon Aristote, l’introduction de la monnaie dans la société a eu un effet pervers :
4/ elle a poussé certains à vouloir obtenir par l’échange "le plus grand profit possible" et à rechercher l’accumulation infinie de richesses. C’est ce qu’il appelle la "chrématistique".
5/ Cette dernière est contraire à la "bonne richesse" qui découle de la gestion raisonnable de son domaine. La richesse née de l’échange est, elle, stérile dès lors que le profit réalisé par le marchand est exagéré.
6/ Aristote, qui préconise modération et équilibre, ne définit pas ce qu’est cette exagération. Mais il fait référence à une notion de finalité : l’enrichissement est-il une conséquence ou un but ? Si c’est un but, il corrompt la nature humaine.
7/ Aristote n’est pas aussi radical que Platon. Il sait bien qu’un homme doit disposer de biens matériels pour se nourrir et exercer ses activités, sans quoi il lui serait impossible d’être heureux. Mais il ne faut pas avoir comme seul objectif de vie de s’enrichir.
8/ Pour cette raison, le philosophe se montre très critique à l’égard du commerce qui, contrairement à l’agriculture ou à la pêche, ne lui parait pas naturel. Le commerçant ne produit pas des biens.
9/ S’il accepte comme un mal nécessaire le "petit commerce" car ce dernier permet à chacun de se procurer les biens dont il a besoin, il n’aime pas cette activité qui conduit trop souvent ceux qui l’exercent à ne rechercher qu’à faire de l’argent !
10/ Naturellement, un tel jusqu’au-boutisme nous parait aujourd’hui totalement obsolète, nous qui sommes habitués à aller dans les grands magasins ou à acheter en quelques clics via des distributeurs en ligne.
11/ Mais, il faut comprendre qu’Aristote, victime des conceptions de son temps, ne percevait pas l’utilité d’un marchand. Or, cette erreur de conception aura des répercussions majeures puisqu’elle elle inspirera toute la société européenne jusqu’à la fin de l’ère médiévale.
12/ Si Aristote n’aime pas les marchands, il se montre encore plus dur à l’égard de la finance, notamment à l’égard du fameux prêt à intérêt. L’intérêt, c-à-d l’argent qui rémunère l’argent, est évidemment le comble de l’horreur pour tout philosophe grec, et donc pour Aristote!
13/ Ce dernier soutient que l’activité financière est "blâmée à juste titre car elle n’est pas naturelle mais se fait au détriment des autres et il est tout à fait normal de haïr le métier d’usurier du fait que son patrimoine lui vient de l’argent lui-même".
14/ La conception d’Aristote selon laquelle celui qui prête est nécessairement un usurier aura là encore des répercussions importantes. Car elle va dominer la pensée occidentale pendant des siècles et sera largement reprise par l’église catholique.
15/ L’association du taux d’intérêt au risque supporté par le prêteur et au facteur temps ne se fera que beaucoup plus tard, avec les marchands italiens, les hommes d’Eglise de Salamanque et la Réforme protestante.
16/ La suite demain
You can follow @alexiskarklins.
Tip: mention @twtextapp on a Twitter thread with the keyword “unroll” to get a link to it.

Latest Threads Unrolled: