Un petit glossaire pour nos amis non familiers du judaïsme:

Yom Kippour: Jour de l'Expiation aussi dit "Jour du Grand Pardon" (Roger Hanin tout ça) ou bien en hébreu Shabat Shabaton (le Shabat des Shabat)

En ce jour, Dieu accorde l'expiation pour tous les péchés. https://twitter.com/noemie_issan/status/1180852409771479040
Tous? Non. (Poke Astérix)

Pas ceux commis entre les hommes qui eux nécéssitent une demande de pardon explicite faite à celui ou celle que l'ont aurait blessé.

C'est sur cette specificité que j'ai voulu réfléchir dans mon thread.
Mishna: Pour les juristes en gros l'équivalent juif du Digeste de Justinien. Codification/Anthologie de la Loi par R. Judah le Prince au IIe siècle EC en Palestine. Cite des avis juridiques des tannaïm (sages juifs depuis l'époque du Second Temple)

.
Style généralement apodictique. Preserve les avis minoritaires et les débats. Comporte aussi des récits (très brefs) et des citations de midrashim (homélies juridiques sur des versets de la Bible)
Le mode de preuve de certaines règles est parfois la logique ou la raison pure (sevara) parfois l'homélie (la drasha, preuve par les versets)

Or, et c'est ce qui est interessant dans le mode de preuve par drasha, c'est que parfois les versets ne sont pas du tout transparents.
Voir ils ont l'ait de parler d'absolument autre chose. Il s'agit alors, comme c'est le cas dans la mishna citér dans mon thread, de dérouler la pensée qui se cache derrière la superposition d'une règle et d'un verset cryptique ou explicite. Ainsi, loin d'être une pensée servile
Qui se soumet à la littéralité du texte, la derasha est un mode de pensée philosophique qui vise a créer l'etonnement. Quel rapport entre le verset et la règle. Du coup le verset éclaire la règle et vice-versa.
Ici le problème d'ordre philosophique est le suivant. Comment éviter l'effet pervers que le dedommagement financier d'un dommage corporel ne soit assimilé à un droit de blesser? Réponse: en mettant l'offenseur "a la merci" de celui qu'il avait offensé. Même Dieu ne peut rien.
Mais cette solution pose elle même un problème d'autre philosophique et éthique: comment éviter que ce pouvoir accordé a l'offensé ne se transforme en cruauté.
Tout cela pour finir par penser une définition du pardon juif qui n'a pas ou peu à voir avec un don ou une grâce mais tout à voir avec une structure de pouvoir:

Avoir été blessé, c'est s'être senti à la merci d'un autre humain. Et c'est terrible.
Le pardon au sens de mehila se pense alors comme une structure paradoxale d'un pouvoir accordé auquel il faut renoncer.
Celui d'avoir son offenseur à sa merci. Pour regagner quelque chose d'intime qui a été blessé. Je pense notamment à ces nombreuses vidéos ou des enfants violés vont confronter leur violeur, pour que la peur change de camp. Pour que le chasseur se sente chassé. Enfin zavez compris
Mais dans le même temps, ce droit qui a des vertus therapeuthiques risque de se transformer en son double hideux: la cruauté.
Voilà pourquoi le pardon au sens de mehila est un moment d'une dialectique et pas une fin en soi. Il faut qu'il soit dépassé.
Bon, avec ça j'espère que c'est plus clair.
Ah oui, manque l'expression המבין יבין, "hamevin yavin" que j'utilise dans mon thread sans la traduire. C'est simplement un truisme qui dit" Celui qui comprend, comprendra". Cette expression fait signe vers un double discours ou vers un discours qui fait allusions à des débats
Contemporains, sans le faire explicitement. Par exemple ici, je pense que la reflexion religieuse donne des outils pour reflechir aux questions actuelles de repentance, de pardon, de rancoeur meme au niveau collectif
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